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Fret ferroviaire : militarisation croissante
Alors qu’il a été largement délaissé sur le plan civil, le fret ferroviaire est aujourd’hui considéré comme stratégique dans la préparation d’une guerre sur le territoire européen.
Ainsi, le 24 janvier, la Commission européenne a annoncé le versement d’une nouvelle aide de 807 millions d’euros pour financer 38 projets de « mobilités militaires », notamment la rénovation d’installations ferroviaires dans dix pays de l’Union européenne.
En France, une grande partie des triages et des gares de fret ont été fermés depuis quarante ans et Fret SNCF est en cours de liquidation. Mais la SNCF vient de recevoir de la Commission européenne une subvention de 54,3 millions d’euros pour rénover quatre gares de triage à usage civil et militaire. 75 % des fournitures militaires françaises sur le flanc est de l’OTAN, en Pologne et en Roumanie, partent déjà par voie ferrée. Le nombre de trains militaires est passé de 300, essentiellement sur le territoire national, à plus de 500, principalement internationaux.
Dans une audition à l’Assemblée nationale en novembre 2023, le général Poulette, responsable de l’acheminement des troupes et du matériel, expliquait : « À très court terme, le soutien à l’Est passe par la voie ferrée, mais nous travaillons aussi, au sein des armées et au niveau interministériel, sur l’hypothèse d’un engagement majeur. La guerre en Europe n’est plus en effet le souvenir de vieillards mais quelque chose de concret qui, nous le savons tous, pourrait advenir très vite. Or aujourd’hui, il nous serait très difficile, sans la voie ferrée, de mobiliser les armées françaises pour un conflit majeur. La voie ferrée, qui nous apporte la capacité de déplacer en masse du matériel et du personnel, est donc regardée avec attention par les logisticiens interarmées, par ceux de l’armée de terre, et par les chefs des armées. »
D’ores et déjà, l’armée a obtenu de la SNCF la priorité dans ses acheminements. Le lieutenant-colonel Lamaty, commissaire militaire aux chemins de fer, regrettait par exemple qu’au déclenchement du conflit à Gaza, un train Vannes-Toulon destiné au transport de deux régiments n’ait pas pu être formé dans les temps.
Une convention « des transports ferroviaires urgents » a donc été signée entre l’armée et le ministère des Transports qui permet d’imposer un acheminement dans les 72 à 120 heures, malgré des contraintes hors normes : un train de chars Leclerc, par exemple, ne peut pas croiser un autre train en raison de sa largeur. L’armée a aussi imposé l’ajout d’une voiture-voyageurs aux trains de munitions pour un accompagnement militaire.
Si les rames de voyageurs sont souvent hors d’âge, l’armée en revanche dispose d’un matériel sophistiqué avec 500 wagons dont 200 sont surbaissés pour permettre le chargement des nouveaux véhicules blindés. Cent cinquante autres ont été spécialement conçus pour le transport des chars Leclerc, et 100 pour les conteneurs. Fret SNCF fournit aussi 220 wagons plats, et l’armée va s’équiper de 250 nouveaux wagons polyvalents.
Dans le transport ferroviaire comme dans l’ensemble de la vie sociale, la bourgeoisie prépare méthodiquement la grande boucherie. Il faut l’arrêter !