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Pérou : les manœuvres de Fujimori
Samedi 26 juin, vingt jours après le deuxième tour de l’élection présidentielle au Pérou, les partisans du candidat de centre-gauche Pedro Castillo ont manifesté pour que sa victoire électorale soit enfin reconnue.
Son adversaire de droite, Keiko Fujimori, refuse de reconnaître sa défaite. Pire, elle et ses partisans ont déclenché une campagne raciste contre les électeurs de Castillo. Non contente de traiter ces électeurs d’origine indienne d’arriérés et d’analphabètes, parce qu’ils n’ont pas voté pour elle, la candidate battue dénonce une fraude électorale parce qu’elle n’est distancée que de 44 000 voix. Et, bien que les observateurs internationaux et le département d’État nord-américain aient déclaré que l’élection était un modèle de démocratie, la candidate de droite réclame maintenant un audit international qui lui donnerait raison, de la même façon que la droite conservatrice bolivienne avait réussi à annuler en sa faveur la dernière élection d’Evo Morales.
Keiko Fujimori met d’autant plus de zèle dans ses manœuvres que la justice péruvienne vient de la dispenser d’une détention provisoire faisant suite aux poursuites engagées contre elle pour blanchiment d’argent et financement illicite, dans lesquelles, en théorie, elle risque une peine de trente ans de prison. Mais les juges péruviens, comme d’autres, savent dans quel camp ils jouent.
Si une partie de l’électorat populaire d’origine indienne n’a pas voté pour la candidate de droite, il y a à cela de bonnes raisons : cette population n’a pas oublié la politique menée par son père quand il était président dans les années 1990, notamment sa politique de stérilisation forcée massive des femmes indiennes.
Pour le reste, que la droite péruvienne, comme d’ailleurs la droite dans toute l’Amérique latine, soit prête à tous les coups tordus pour conserver le pouvoir politique, ce n’est pas une surprise. Les parlementaires péruviens se conduisent comme une mafia.
On les a vus à plusieurs reprises démettre des présidents qui n’étaient pas de grands réformateurs, mais qui ne leur convenaient pas, au nom, sans rire, de la lutte contre la corruption, un sujet dont ils sont par ailleurs experts.
Que le candidat légitime soit finalement élu ou pas, ce n’est certes ni à la présidence ni au Parlement que se réglera le sort des classes populaires, et ceux qui manifestent aujourd’hui pour soutenir Castillo auront intérêt à rester mobilisés.