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Leur société
Télétravail : au début comme à la fin, c’est le patronat qui décide
« Il ne faut pas de contraintes supplémentaires, mais du bon sens et des discussions au plus près du terrain. » Ainsi se trouve résumée la position du patronat par la bouche du représentant du Medef dans les actuelles négociations entre patrons et confédérations syndicales au sujet du télétravail.
Lors de l’annonce du nouveau confinement, le discours gouvernemental paraissait ferme. « Le télétravail n’est pas une option », affirmait la ministre Élisabeth Borne. « Dans le secteur privé, toutes les fonctions qui peuvent être télétravaillées doivent l’être cinq jour sur cinq », précisait Castex. « Des contrôles et des sanctions seront appliqués si cela n’est pas respecté », ajoutait le porte-parole Gabriel Attal. Et la ministre du Travail de se laisser filmer rendant visite, dans le quartier d’affaires Paris-La Défense, à Total, BNP Paribas ou Engie pour rappeler aux dirigeants la ligne gouvernementale en ces temps de crise sanitaire.
Il n’empêche que, selon un sondage qu’elle a commandé et rendu public le 10 novembre, seuls 18 % des actifs ont télétravaillé pendant la première semaine du mois. En effet 15 % des chefs d’entreprise ont refusé catégoriquement cette solution, et 27 % en acceptent le principe mais demandent tout de même aux salariés de venir sur le site. Quant aux télétravailleurs, même volontaires, ils dénoncent les pressions de leur direction. Les grandes entreprises concernées sont loin de jouer le jeu, et ne le jouent que si elles y trouvent avantage.
Choisi, le travail à distance peut convenir aux salariés, mais c’est tout sauf un espace de liberté. Devoir envoyer à son chef un tableau pointilleux des tâches effectuées, subir contrôles et méfiance, et surtout se retrouver seul sans pouvoir échanger avec les collègues, tout cela peut contribuer à rendre le télétravail insupportable à celui qui le pratique.
La négociation réclamée depuis le printemps par les directions syndicales pour définir les droits des salariés dans ce cadre, comme la limitation de la charge de travail, de sa durée, le droit au repos et à la déconnexion, la prise en charge des frais liés au télétravail, la préservation de la vie privée, etc., se heurte de toute façon à l’attitude du patronat. Pourtant, à entendre Geoffroy Roux de Bézieux, du Medef, loin d’être réticents à la mise en place du télétravail, les chefs d’entreprise refusent seulement le « cadre contraignant » qu’un accord voudrait leur imposer.
Ils ne l’accepteraient que « ni prescriptif ni normatif », et plus souple encore que ne le prévoit la rédaction de la mouture 2017 du Code du travail. Dans cette dernière, un accord collectif est remplacé par un accord de gré à gré, comme si un salarié et son patron se trouvaient sur un pied d’égalité.
De plus, ce que les représentants du patronat veulent éliminer, c’est non seulement le fait d’avoir à rembourser les frais engagés par les télétravailleurs, mais surtout la «présomption d’imputabilité» qui rend aujourd’hui les chefs d’entreprise responsables en cas d’accident du travail à domicile.
Y gagner le plus possible, virus ou pas, voilà la ligne de conduite des patrons, habitués à faire régner leur loi au-delà des murs de l’entreprise. Ne pas se laisser faire, telle doit être la réponse des travailleurs, télé ou non.