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Leur société
Saint-Denis : une évacuation indigne
Mardi 17 novembre la police a évacué le camp de migrants installé près du stade de France à Saint-Denis. 2 500 personnes y survivaient dans des conditions indignes.
Lorsque l’évacuation a commencé à l’aube, 70 cars encadrés par d’importantes forces de police étaient là pour convoyer les migrants dans les 26 centres d’hébergement prévus pour les accueillir. Tous les alentours étaient bouclés, la station de métro voisine fermée et le trafic du tramway interrompu. La bousculade pour monter dans les cars a donné lieu à des affrontements avec la police et certains, arrosés de gaz lacrymogène, ont dû être pris en charge par le Samu ou les pompiers. Comme à chaque évacuation, les tentes et les affaires que les migrants ne pouvaient emporter ont été brûlées et les pompiers ont dû intervenir.
Ce camp s’était installé là il y a quelques mois, après l’évacuation de celui situé le long du canal Saint-Denis à Aubervilliers, qui avait lui-même succédé au camp de la porte de La Chapelle, à Paris. C’est un cycle sans fin et l’on doit en être à plus de 70 évacuations de camps. Après un bref répit à l’abri, les migrants rejoignent la rue et se regroupent dans un nouveau lieu. Être en groupe, même dans les pires conditions, est encore préférable à se retrouver seul.
Dans le camp du stade de France vivaient surtout des Afghans, mais aussi des Somaliens et des Érythréens. Ce n’est que tout dernièrement que des toilettes et des robinets d’eau avaient été installés. Auparavant, des latrines bricolées, quand ce n’était pas l’eau polluée du canal voisin, en tenaient lieu. Les repas étaient cuisinés sur des braseros de fortune, avec le risque d’incendie que cela implique là où les toiles de tente se touchaient presque. Le climat d’insalubrité était propice au développement des maladies, en particulier la gale, dont les cas augmentaient de jour en jour. Seules les associations prenaient en charge la survie quotidienne des migrants, Médecins du Monde pour la santé, des collectifs de bénévoles pour le reste.
Les migrants évacués vont sans doute bénéficier, comme à chaque fois, d’un court séjour en hébergement d’urgence. Ils seront testés pour le Covid-19, nul ne connaissant l’état de l’épidémie dans ce camp où survivre, manger, être à l’abri, passait bien avant le souci d’éviter une contamination. Puis ils seront, comme à chaque fois, remis à la rue. Le préfet de police, Didier Lallement, a pour sa part profité de l’occasion pour rappeler que « les personnes en situation irrégulière n’ont pas vocation à rester sur le territoire », appelant ainsi ses services à faire le tri parmi les évacués.
Mettre à l’abri 2 500 personnes de façon décente et sûre serait très facile pour le gouvernement d’un des pays les plus riches du monde. Il préfère les laisser se détruire physiquement et moralement, balancés de camp en camp, afin de signifier à tous ceux tentés par l’émigration que mieux vaut rester dans leurs pays d’origine. C’est un choix politique odieux.