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Dans le monde
Afghanistan : vers la paix des cimetières ?
Le 2 septembre, les représentants des États-Unis et ceux des Talibans annonçaient qu’un accord de paix était en bonne voie en Afghanistan. Deux heures après une bombe éclatait à Kaboul, la capitale afghane, tuant près de vingt personnes à proximité du quartier réservé aux étrangers pourtant transformé en forteresse.
Le même scénario, déclaration des négociateurs suivie d’un attentat meurtrier, s’est déjà déroulé à plusieurs reprises depuis dix mois que Talibans et Américains parlementent. Les bombes sont un élément du rapport des forces, entre les Talibans et les États-Unis comme entre les différentes nuances de Talibans, les factions concurrentes et même le gouvernement croupion.
En 2001, prétendant aller chercher les auteurs de l’attentat du 11 septembre, les États-Unis avaient envahi le pays, chassé les Talibans et installé à Kaboul un gouvernement à leur dévotion. Le président Bush avait alors reçu l’appui de tous ses alliés, dont la France. À ceux qui n’étaient pas convaincus par l’efficacité de cette guerre contre le terrorisme, en France notamment, les gouvernements avaient servi le prétexte de la lutte pour le progrès humain et la civilisation, lutte qui nécessitait selon eux l’élimination des Talibans par les militaires occidentaux. Les uns et les autres passaient sous silence le fait que les islamistes talibans, comme bien des groupes terroristes, avaient débuté avec la protection et le financement américains, dans le cadre de la lutte contre l’Union soviétique.
Il apparut rapidement après l’intervention que les bombardiers et les commandos étaient bien incapables d’apporter la paix, que l’impérialisme ne trouvait que des corrompus pour se mettre à son service et que les Talibans, les chefs de guerre et les clans trafiquant l’opium continuaient à prospérer. Les États-Unis ont, à ce jour, dépensé pour mener cette guerre plus de mille milliards de dollars, tombés en grande partie dans les coffres des marchands d’armes et des compagnies militaires privées, sans pouvoir prétendre avoir réglé quelque problème que ce soit. Les exactions, y compris contre des civils, sont innombrables, le terrorisme n’a jamais cessé.
La diplomatie américaine a donc, presque depuis le début de la guerre, sans cesse hésité entre le renforcement de la présence militaire ou des négociations pour pouvoir se dégager sans trop perdre la face. Mais on ne peut négocier qu’avec des forces réelles, c’est-à-dire en l’occurrence avec les milices armées les plus puissantes, celles des Talibans. Ce n’est pas la première fois que de telles négociations sont engagées et rien ne dit que celles-ci vont aboutir. Mais, quoi qu’il en soit, les États-Unis envisagent donc de rendre le pouvoir à ceux qu’ils prétendaient combattre, les Talibans intégristes, spécialistes des exécutions publiques, de l’enfermement des femmes, de la déscolarisation des fillettes, de la culture du pavot et extrêmement tolérants à l’égard des groupes terroristes internationaux. Ils le leur rendraient après dix-huit ans de guerre, la plus longue menée par les États-Unis et après avoir dévasté un pays qui figurait déjà parmi les plus pauvres de la planète.