Mali : l’armée française dans l’impasse18/11/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/11/2729.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Mali : l’armée française dans l’impasse

Un cadre d’al-Qaida au Maghreb islamique, Ba Ag Moussa, a été tué le 10 novembre par les militaires français de l’opération Barkhane. C’est le deuxième chef djihadiste abattu, après Abdelmalek Droukdel en juin dernier. La ministre des Armées, Florence Parly, s’est aussitôt félicitée d’un nouveau « succès majeur dans la lutte contre le terrorisme ».

Plus la ministre parle, et plus elle apparaît comme une adepte convaincue de l’auto-persuasion. La terreur dans laquelle vit une grande partie de la population malienne ne résulte pas des faits d’armes de tel ou tel chef de guerre djihadiste, mais de la déstabilisation totale du pays, à laquelle l’intervention militaire française de 2013 a largement contribué.

Aujourd’hui, on estime que plus de 250 000 personnes ont dû s’enfuir de chez elles à cause des attaques de villages, principalement dans le nord et le sud du pays, dans les régions de Ségou et Mopti, qui vivaient en paix lorsque l’armée française a débarqué. Les djihadistes, qui n’attendent pas les ordres venus de la direction d’al-Qaida pour commettre leurs exactions quotidiennes, ne sont pas seuls en cause. Les violences inter-ethniques exacerbées par les autorités maliennes ont fait des ravages, tout comme les massacres de civils par l’armée malienne sous couvert de représailles contre les djihadistes.

Les écoles sont souvent fermées à cause de la terreur que font régner les groupes djihadistes, qui n’hésitent pas à assassiner les enseignants. Les infrastructures indispensables à la population, ponts, routes, bacs, sont régulièrement sabotées, ce qui empêche la circulation des habitants et compromet l’approvisionnement des marchés. Se déplacer d’une ville ou d’un village à l’autre ne se fait qu’à ses risques et périls.

Dans ce chaos, l’armée française a largement prouvé en sept ans que son intervention n’assure pas la sécurité de la population. Bien au contraire, la présence militaire française entretient et protège tout ce dont souffre la population malienne et la révolte : les exactions de l’armée, la corruption des dirigeants, la richesse d’un petit nombre tandis que partout on vit dans la misère. C’est là le terreau sur lequel prospèrent les groupes djihadistes et c’est ce qui explique leur expansion dans tout le pays. C’est cela qui jette sans cesse de nouvelles recrues dans les bras de ces groupes et les fait adhérer à leur idéologie retrograde prônant le terrorisme non seulement contre le pouvoir, mais aussi contre la population. L’armée française peut bien tuer quelques chefs djihadistes, voire quelques dizaines de leurs hommes, cela fera seulement autant de martyrs aux yeux de ces nouveaux venus.

Les militaires français sont de plus en plus perçus comme une armée d’occupation, qui mène sa propre guerre et desquels la population n’attend plus rien. S’ils avaient été accueillis en libérateurs à Gao et à Tombouctou en 2013, les manifestations de cette année ont fini par réclamer leur départ. En poussant des cris de victoire à chaque djihadiste ou présumé tel tué, Florence Parly cherche surtout à cacher que la France est au Mali dans une situation sans issue.

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