Nouvelle-Calédonie : le vote indépendantiste progresse07/10/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/10/2723.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Nouvelle-Calédonie : le vote indépendantiste progresse

Dimanche 4 octobre s’est déroulé le deuxième référendum posant la question de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie. Si le non à l’indépendance l’a emporté à plus de 53 %, les faits marquants sont la forte mobilisation des électeurs, avec 86 % de taux de participation, et la progression significative des oui, qui ont augmenté de plus de 3 % par rapport au premier référendum de 2018 et ont réduit l’écart avec le non à moins de 10 000 voix.

Déjà en 2018, lors du premier référendum, le résultat du vote indépendantiste avait surpris, dépassant les 43 %, alors que la population kanake représente moins de 40 % des 269 000 habitants de la Nouvelle-Calédonie. Si le camp indépendantiste a cette fois-ci rallié une partie des minorités immigrées des îles du Pacifique (Wallis, Fidji…), il reste que le nombre important de voix en faveur de l’indépendance témoigne surtout de la mobilisation de la jeunesse kanake, qui a permis au vote indépendantiste de progresser y compris à Nouméa, la capitale, un fief loyaliste et anti-indépendantiste.

Les raisons de cette mobilisation sont à chercher dans l’oppression que les Kanaks continuent à subir et à ressentir 170 ans après l’occupation de la Nouvelle-Calédonie par la France. Quand on est kanak, on est minoritaire dans son propre pays, en moyenne plus pauvre, beaucoup plus pauvre, on est deux ou trois fois plus au chômage et bien plus mal logé ; c’est continuer de vivre dans une situation coloniale, alors que la bourgeoisie et la petite bourgeoisie caldoches et françaises, regroupées autour de Nouméa, s’approprient l’essentiel des richesses et du pouvoir.

Pendant la campagne du référendum, les partis nationalistes kanaks ont comme en 2018 multiplié les gestes, promettant, avec la binationalité et une longue période de transition, de maintenir une association avec la France. La progression du oui va leur permettre de revendiquer plus de place au sein des institutions calédoniennes sous l’égide de l’État français. Ils dirigent déjà les deux provinces les plus pauvres et participent au gouvernement de Nouvelle-Calédonie de façon minoritaire. Avant le référendum, ils ont demandé que l’État français accélère le transfert des compétences encore sous sa responsabilité, comme l’enseignement supérieur et la régulation audiovisuelle. Ils ont aussi manifesté pour que l’une des entreprises exploitant le nickel, aujourd’hui entre les mains du brésilien Vale, devienne une entreprise « pays ».

Quant aux partis anti-indépendantistes, essentiellement la droite et l’extrême droite regroupées dans une coalition qui se nomme « les Loyalistes », ils ont cherché à mobiliser leurs électeurs, théoriquement majoritaires, en leur faisant peur, en affirmant que les ponts avec la France seraient coupés au plus vite en cas de victoire du oui. Leurs voix ont aussi augmenté, mais en moindre mesure. Alors qu’ils comptaient sur une nouvelle victoire pour renforcer leurs positions, leurs faibles résultats rendent la chose plus difficile. Favorables à l’autonomie telle qu’elle existe aujourd’hui, ils militent pour un renforcement du pouvoir des provinces, ce qui permettrait à la province de « Nouméa-la-blanche », la province la plus riche, d’être plus autonome et de conserver la main sur la plupart des richesses de l’archipel. Ils font le constat que leur avance s’effrite. Dimanche soir 4 octobre, les partis nationalistes kanaks ont annoncé leur volonté d’aller au bout du processus des accords de Nouméa en demandant la tenue du troisième référendum. Une période de tension s’ouvre sans doute entre les différents camps. Le cadre fixé par les accords de Nouméa est un cadre très contraignant, y compris en cas de victoire des indépendantistes. Mais le résultat électoral peut aussi être un encouragement pour la jeunesse, les pauvres et les travailleurs kanaks à se mobiliser contre la bourgeoisie française et caldoche.

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