Italie : 25 avril 1945 – 25 avril 2020, hypocrisie et falsification historique28/04/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/04/2700.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : 25 avril 1945 – 25 avril 2020, hypocrisie et falsification historique

Le 25 avril, l’Italie a célébré le 75e anniversaire de la chute de Mussolini et du régime fasciste, qui marqua dans le pays la fin de la guerre. Devenue jour férié, cette date équivaut au 8 mai dans d’autres pays européens. Proclamé « insurrection antifasciste », ce 25 avril 1945 est devenu l’événement fondateur du régime parlementaire italien et la référence absolue en matière d’union nationale. Nous publions ci-après l’article de nos camarades de L’Internazionale (UCI) à ce sujet.

La question du 25 avril et de sa signification est revenue dans l’actualité. Mais, à propos du fascisme, de l’antifascisme, de la Résistance et de la « Libération », les travailleurs, et en particulier la jeune génération, doivent avoir les idées claires. Le fascisme était un mouvement fomenté et subventionné par une fraction toujours plus importante de la grande bourgeoisie, c’est-à-dire les industriels, les banquiers, les grands propriétaires terriens. C’est pour des raisons de classe qu’il vit le jour. Le mouvement ouvrier était devenu trop fort et menaçait de « faire comme en Russie », c’est-à-dire d’exproprier les grandes entreprises et propriétés terriennes et de socialiser les moyens de production. En l’espace de six ans, les bandes fascistes, appuyées par la police, l’armée et les juges d’un État encore « démocratique », ont tué des dirigeants syndicaux, des militants socialistes, anarchistes, communistes. Les fascistes incendiaient et dévastaient les Maisons du Peuple et les Bourses du travail. Toutes ces exactions étaient commises au nom de la « nation », à grand renfort de drapeaux tricolores brandis par les bandes fascistes et affichés aux fenêtres des Bourses du travail après leur mise à sac. Et, une fois devenu un régime totalement dictatorial, le fascisme s’attribua les faveurs de nombreux hommes de pouvoir, y compris à l’étranger.

La Seconde Guerre mondiale fut une guerre impérialiste, au même titre que la Première, dont elle était d’ailleurs le prolongement. Pour Trotsky, « Toute tentative de présenter la guerre actuelle comme l’affrontement des idées de démocratie et de fascisme appartient au règne de la charlatanerie ou à celui de la stupidité. »

Le phénomène étiqueté aujourd’hui sous le terme de Résistance comporte des éléments très divers et de nombreuses facettes. Il s’agit d’un côté du repositionnement effectué par la classe dirigeante italienne qui, de soutien enthousiaste du régime mussolinien, se transforma en ardente « antifasciste » dans le cadre de la victoire assurée des Alliés sur l’Allemagne de Hitler. D’un autre côté, c’était les conditions de misère et de précarité qui favorisaient la diffusion d’une hostilité croissante envers le régime fasciste et l’armée allemande, devenue force d’occupation après l’armistice signé par le gouvernement provisoire de Badoglio avec les Alliés, le 8 septembre 1943.

En 1943 et 1944, les grèves des grandes usines du Nord montraient que la force et la volonté de lutter existaient dans la classe ouvrière. À cause des staliniens du PCI en particulier, cette force a été canalisée en soutien à la « Libération » du pays, au lieu d’être dirigée contre le système capitaliste et ses défenseurs de tous bords politiques. Malgré cette trahison, les idées révolutionnaires continuaient à circuler.

Souvent, les travailleurs s’expliquaient les directives du parti communiste en y voyant une ruse destinée à tromper la bourgeoisie, ou une tactique pour procéder à la prise du pouvoir par étapes : une fois vaincu le régime fasciste, nous nous libérerons des occupants, puis ferons la révolution socialiste. Le dirigeant du PCI, Togliatti, dut intervenir de tout son poids pour expliquer que la révolution socialiste n’était en aucun cas à l’ordre du jour. Parmi les partisans eux-mêmes, malgré la politique des chefs staliniens, l’idée était répandue que la fin du régime fasciste devait s’accompagner d’une transformation sociale radicale en direction du socialisme et de la fin du capitalisme.

Tous ces espoirs, toutes ces énergies, furent trahis par les dirigeants staliniens du parti communiste et par ceux, réformistes, du parti socialiste. Le mythe de la Résistance permettait de faire taire les oppositions entre classes sociales. Les insurrections de plusieurs villes, qui se soulevèrent pour se libérer des occupants et des fascistes avant l’arrivée des troupes anglo-américaines furent vite utilisées pour accréditer l’idée d’un « sursaut national » dont les dirigeants italiens allaient tenter de se servir dans les négociations internationales, pour faire oublier leur ralliement précédent à Hitler.

La vérité est toujours révolutionnaire. S’abandonner aux mythes et à la rhétorique officielle équivaut à se retrouver sous les effets d’une drogue abrutissante. Notre antifascisme doit être dirigé contre les représentants actuels du nationalisme et de la réaction. Contre les Salvini, Meloni, Berlusconi et consorts, mais aussi contre tous les autres soutiens du capitalisme, car c’est précisément l’histoire du fascisme qui démontre que le capitalisme est tout à fait capable de se servir de tous les types de régimes pour garantir sa propre existence et que, lorsqu’il se sent menacé, il ne recule devant aucun crime et aucune atrocité.

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