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Leur société
Les réseaux de transport : victimes du Covid et de la rapacité patronale
Victimes collatérales de la crise sanitaire, de nombreux réseaux de transport annoncent aujourd’hui être au bord de l’asphyxie. En cause : la baisse de la fréquentation et surtout le tarissement de la taxe versée par le patronat pour financer les transports collectifs.
Les collectivités territoriales qui ont un réseau de transport collectif ont la possibilité de lever une taxe que l’on appelle maintenant le versement mobilité (anciennement versement transport). Payée par les entreprises comptant plus de 10 salariés, cette taxe est essentielle dans le financement des transports collectifs – elle représente 8 à 9 milliards d’euros par an, et bien souvent plus de la moitié du budget des réseaux de transport.
Mais l’épidémie a bouleversé le système : d’abord parce que le gouvernement a autorisé le report des cotisations et taxes pour les entreprises – report qui pourrait bien se transformer en annulation définitive dans plusieurs secteurs. Ensuite, parce que, pour les quelque 12 millions de salariés au chômage partiel au plus fort de la crise, l’État a compensé une partie du salaire, mais n’a versé ni les cotisations sociales ni les taxes – donc pas le versement mobilité. Enfin, la hausse drastique du chômage, qui a déjà commencé et va immanquablement se poursuivre dans les mois à venir, aura des conséquences directes sur le versement mobilité, puisque celui-ci est calculé sur la masse salariale, qui dépend du nombre de salariés des entreprises.
Pour aggraver encore le problème, le confinement lui-même et la mise en télétravail forcé de millions de salariés a eu un effet direct sur la fréquentation des transports collectifs, et donc sur leurs recettes.
Résultat : de nombreuses collectivités, des plus grandes comme la région Île-de-France jusqu’aux plus petits réseaux de bus dans les villes moyennes, ont enregistré en deux mois des pertes allant jusqu’à 20 à 30 % de leur budget annuel. Les conséquences iront bien au-delà du seul domaine du transport. La ville d’Aubenas, par exemple, a d’ores et déjà annoncé que, pour tenter d’éponger les pertes de son réseau de transport, elle allait renoncer à un certain nombre d’investissements, notamment en travaux de voirie, ce qui ne fera qu’accentuer les conséquences de la crise pour les entreprises des travaux publics et leurs salariés.
Face à cette situation, ni le gouvernement, ni les entreprises de transport ne sont prêts à faire le moindre geste pour aider les collectivités. L’État veut bien mettre 7 milliards d’euros pour maintenir les profits des actionnaires d’Air France, 5 milliards pour ceux de Renault, mais apparemment pas mettre la main à la poche pour tirer du marasme des petits réseaux de transport pourtant indispensables aux déplacements quotidiens des travailleurs.
Quant aux géants du transport collectif que sont Transdev et autres Keolis, ils veulent bien s’engraisser au travers de contrats de délégation de service public particulièrement juteux, mais certainement pas être mis à contribution dans les périodes de vaches maigres : cyniquement, ils laissent déjà entendre que si les collectivités n’arrivent pas à payer leurs « contributions », comme certaines l’annoncent déjà, ils ne se gêneront pas pour diminuer d’autant l’offre de service public qu’ils dispensent.
C’est sans doute cela que Macron et le gouvernement appellent « la solidarité nationale ».