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Dans le monde
États-Unis : la politique du gros bâton
En faisant bombarder une base militaire syrienne puis en envoyant une escadre vers les côtes de la Corée du Nord, le président américain Donald Trump a voulu montrer la capacité des États-Unis à intervenir militairement là où ils le veulent, quand ils le veulent, sans demander l’autorisation ni même l’avis de qui que ce soit.
Les prétextes avancés pour les deux opérations sont, en Syrie, un bombardement chimique ayant atteint des enfants, en Corée, un nouveau tir de missile. En Syrie, les horreurs sont quotidiennes, les enfants assassinés innombrables, les coupables connus, à commencer par les États-Unis eux-mêmes. À l’autre bout du monde, les essais de missiles de la Corée du Nord sont relativement fréquents et jusque-là inoffensifs, les seules victimes de la dictature sont les Coréens eux-mêmes. Non seulement ces situations ne sont pas nouvelles, mais les États-Unis y ont une lourde part de responsabilité.
Le contexte général explique bien mieux ces démonstrations de force que tous les discours du président américain. Trump a envoyé ses missiles à la veille du voyage de son ministre des Affaires étrangères en Russie. Les bombes sont tombées en Syrie, mais c’est le président russe Poutine, allié du dictateur syrien, qui est prévenu. Non seulement les États-Unis encerclent la Russie d’un réseau de bases militaires, mais ils veulent limiter l’influence russe en Syrie. De même le porte-avions américain a été dérouté vers la Corée du Nord, alliée de la Chine, au moment même où le président chinois était en visite chez Trump.
Ce dernier a d’ailleurs enfoncé le clou, affirmant ne pas avoir besoin de la Chine pour résoudre la question de la Corée. Le coup de semonce à la Corée vaut aussi pour la Chine, qui cherche à agrandir son espace maritime aux dépens des pays alliés des États-Unis. Comme souvent, les discours, les menaces, voire les coups adressés aux petits pays sont autant d’avertissements aux grands, ceux avec lesquels les États-Unis sont potentiellement ou réellement en concurrence.
De plus, au-delà de la capacité militaire des États-Unis, dont personne ne doute, Trump a voulu démontrer qu’il avait personnellement la volonté de faire usage de la force. Peut-être s’agit-il de rodomontades sans lendemain, d’une opération de communication. Après tout, l’armée américaine a effectué près de 20 000 missions de bombardement au Moyen-Orient depuis 2014 et sa marine patrouille sans cesse sur tous les océans et même en dessous, les deux dernières opérations ne se signalant que par les discours présidentiels d’accompagnement. Peut-être s’agit-il, pour un président en difficulté, d’impressionner le peuple américain. Peut-être s’agit-il du jeu considéré comme normal des rapports de force entre grandes puissances, Trump voulant discuter avec la Chine et la Russie en position de force.
Quoi qu’il en soit, comme toujours, les interventions de l’impérialisme américain sont des opérations de guerre, dans lesquelles il se croit autorisé à frapper où et quand il le décide. Un lointain prédécesseur de Donald Trump, le président Theodore Roosevelt, appelait cela en 1904 la politique du gros bâton. L’instrument n’a fait que se perfectionner.