Toulouse - explosion AZF : Total est responsable !25/02/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/02/une2117.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Toulouse - explosion AZF : Total est responsable !

Le procès en correctionnelle de la catastrophe AZF (Grande-Paroisse filiale de Total) s'est ouvert à Toulouse le 23 février 2009, sept ans et demi après l'explosion de l'usine.

Aujourd'hui on ne compte pas moins de 1 800 parties civiles acceptées dans la procédure en cours, mais la justice ne met en cause que le directeur de l'usine à l'époque, et l'entreprise Grande-Paroisse. Et si le trust Total est finalement convoqué au procès, c'est que les associations de sinistrés demandent qu'il soit cité à comparaître en tant que personne morale, ainsi que son ex-PDG Desmarets. Le tribunal correctionnel en décidera le 25 février.

La première audience s'est ouverte en présence de près de 1 500 personnes, sinistrés et victimes. Il y avait aussi des ex-salariés, et pas uniquement ceux qui se sont regroupés dans l'association qui s'est solidarisée avec Total. La lecture de la longue énumération des morts et des blessés graves s'est faite dans un silence pesant et, pour certains, lourd de rancoeur. Le 21 septembre 2001, il y eut donc 31 morts (dont 21 sur l'usine elle-même), près de 10 000 blessés, une partie des quartiers populaires de Toulouse soufflée, plus de 40 000 logements sinistrés essentiellement dans les quartiers populaires de Toulouse.

Jusqu'à présent, Total s'en est très bien sorti. Malgré le naufrage de l'Erika, malgré l'explosion d'AZF, malgré des indemnisations diverses que le trust a dû verser (2 milliards d'euros d'après son représentant local), malgré la crise économique, malgré tout cela, le groupe Total vient d'annoncer près de 14 milliards d'euros de bénéfices pour 2008. Un record, battu année après année.

Les conséquences pour les sinistrés...

Face à la quantité de sinistrés, un accord entre Total et l'État avait été passé trois semaines après la catastrophe. Dans sa partie visible cet accord prévoyait que Total s'engageait à favoriser les accords amiables de dédommagement avec les sinistrés (le premier d'entre eux étant l'État). Certes, il y a eu des indemnisations données aux blessés et aux sinistrés, mais cela se fit dans un rapport de force disproportionné entre la machine Total et le sinistré seul, et toujours assorti d'un solde de tout compte. Les travaux, quand ils ont été effectués, l'ont parfois été après des mois, si ce n'est des années, d'attente. Le collectif des « sans-fenêtres » a bataillé pendant plus d'une année contre ce scandale, et contre des travaux faits à la va-vite, avec des quantités de malfaçons, ajoutant encore à l'angoisse des sinistrés.

...et pour les salariés

En 2001, AZF (Grande-Paroisse) était une filiale du groupe TotalFinaElf. Le groupe envisageait de se recentrer en « rationalisant » sa section engrais. Il était question que l'une des deux usines AZF soit sacrifiée. L'explosion a réglé le problème du choix.

Mais pour les indemnisations, il n'a jamais été question des centaines de salariés qui, en dehors du pôle chimique, ont perdu leur emploi ou sont restés au chômage durant des mois avant d'en retrouver un autre. Quant aux entreprises du pôle chimique elles-mêmes, AZF (Grande-Paroisse) et SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs), il y a eu des plans de suppressions d'emplois concernant 400 salariés à AZF et autant à la SNPE.

Deux enquêtes

Malgré l'enquête interne effectuée par les experts de Total, dès le premier jour qui a suivi, rien n'a été trouvé étayant un tant soit peu la thèse de l'attentat, ou d'une circonstance extérieure, sans parler de la piste islamiste, voire d'une météorite.

Cette enquête interne de Total s'est faite en parallèle avec celle de la police scientifique. Mais le périmètre de l'explosion n'a pas été sécurisé et réservé aux investigations de la police. Cela n'a été fait que... dix jours après l'explosion. Pendant ce laps de temps, l'enquête interne de Total a pu se mener en toute tranquillité. Les experts de Total ont pu prendre et analyser tous les échantillons qu'ils ont voulus, et, comme le signale une association de victimes, ils pouvaient tout à fait subtiliser des pièces à charge. Toujours est-il que les policiers arrivaient toujours après les enquêteurs de Total.

Si Total n'a rien trouvé, toutes les enquêtes diligentées par la justice ont conclu, elles, à l'accident industriel, malgré le lobby pro-Total et la profusion de livres mettant en avant les scénarios aussi fantaisistes qu'orientés pour disculper Total.

L'explosion du 21 septembre

L'usine n'était pas une « usine poubelle ». Mais c'est la poubelle de l'usine qui a explosé, c'est-à-dire le secteur de l'usine qui en matière de sécurité laissait le plus à désirer. C'est donc un hangar où était entreposé de l'engrais déclassé qui a explosé.

Les ouvriers de l'usine étaient bien placés pour savoir comment, depuis des années, les exigences en matière de sécurité se traduisaient par une « politique de risques calculés » comme a dit le directeur en octobre 2000. Effectivement ils calculent. Mais ce qu'ils mettent en balance au nom des « réalités économiques », c'est-à-dire des profits des actionnaires, c'est la santé et la vie des ouvriers de l'usine et des riverains. Les vrais responsables ce sont eux.

La division orchestrée par Total entre salariés et sinistrés

À la catastrophe provoquée par l'explosion, s'était à l'époque ajouté le désarroi de certains travailleurs devant l'attitude des syndicats de l'usine (CGT et CFDT) qui se sont aussitôt rangés aux côtés de Total, opposant de fait les ouvriers de l'usine aux sinistrés. Quand des sinistrés dénonçaient la responsabilité de Total dans la catastrophe, ces « syndicalistes » faisaient comme si c'était les travailleurs de l'usine qui étaient visés.

Aujourd'hui encore ces ex-« syndicalistes » persistent dans leur choix de disculper Total, en oubliant tout ce qu'ils avaient dit ou écrit en matière de non-respect de la sécurité pendant les années qui ont précédé l'explosion. Faisant cause commune avec leur ancien employeur, ils condamnent la thèse de l'enquête judiciaire en affirmant qu'on ne sait pas réellement ce qui s'est passé. Le complot contre Total irait des pouvoirs publics jusqu'au dernier « sans-fenêtres ».

Avec les dizaines de milliers de sinistrés, les salariés d'AZF pouvaient exiger que Total paye pour les emplois détruits et les dégâts occasionnés. Plutôt que de s'accrocher à une hypothétique réouverture du site chimique que personne dans la population ne souhaitait, ils auraient pu, à condition d'être une force unie, contraindre Total et le gouvernement à assumer leurs responsabilités.

Le capitalisme : un danger pour la société

En 2001, les instances locales (municipalité, Conseil général et régional) comme nationales avaient géré cette catastrophe en parfaite connivence avec le groupe Total, et en se contentant des mêmes procédures que s'il s'agissait d'un simple dégât des eaux, alors qu'il aurait fallu mobiliser les moyens et la garantie de l'État pour que la situation des sinistrés et des salariés soit réglée au mieux et au plus vite.

Mais dans cette société capitaliste, rien n'est fait dans l'intérêt de la population. Les industriels sont là pour faire du profit, et l'État est là pour faire en sorte que la machine à exploiter fonctionne sans problème. La crise économique actuelle, avec les catastrophes sociales qu'elle génère en est un exemple supplémentaire, à plus grande échelle encore. Les profiteurs profitent, au mépris des conditions de vie de centaines de milliers de travailleurs dont ils exploitent le travail. Et quand survient la crise, l'État est là pour leur sauver la mise en vidant ses caisses, en aggravant la situation de tous.

Il devient urgent et vital pour la population d'imposer son propre contrôle sur la marche de cette économie conçue exclusivement pour le profit d'une poignée de capitalistes. La dictature des capitalistes sur la société nous coûte vraiment trop cher. Elle a assez duré.

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