Rwanda : la vérité sur le génocide… et sur l’impérialisme20/01/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/01/2738.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Rwanda : la vérité sur le génocide… et sur l’impérialisme

La commission d’historiens, instituée par Emmanuel Macron, censée faire enfin toute la lumière sur le rôle joué par la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994, doit rendre son rapport final le 2 avril prochain.

On ne sait si celui-ci sera une tentative désespérée pour blanchir les gouvernements de l’époque ou s’il apportera au moins quelques lumières supplémentaires sur la responsabilité des dirigeants français, et en premier lieu du président de l’époque François Mitterrand dans le massacre de 800 000 personnes. Les faits sont de toute façon maintenant bien connus, malgré l’obstruction faite pendant 26 ans par les gouvernements successifs pour empêcher l’accès aux archives concernant la question. Des historiens tenaces ont réussi à les consulter grâce à des actions en justice, des survivants ont parlé et porté plainte, et même des militaires ont raconté précisément le rôle joué par leurs unités et les ordres que celles-ci avaient reçus de Paris.

Le tableau ne laisse aucun doute. Dès 1990, la France a soutenu et armé un régime de Hutus extrémistes qui préparait le génocide. Le gouvernement de Mitterrand a envoyé cette année-là l’armée française au Rwanda pour protéger ce régime face à l’offensive d’exilés tutsis réfugiés en Ouganda, qui avaient constitué le Front patriotique rwandais (FPR). Pour les dirigeants de l’impérialisme français, il fallait à tout prix éviter que le Rwanda, situé dans la zone d’influence française, ne bascule dans celle des USA et de la Grande-Bretagne à laquelle appartenait l’Ouganda.

Bien avant le génocide de 1994, l’Élysée avait été informé par les chefs militaires et des diplomates des massacres perpétrés contre les Tutsis par des milices affiliées au pouvoir. Cela n’empêcha pas le gouvernement français de continuer à armer les massacreurs. Des machettes furent livrées aux milices, des armes et projectiles à l’armée régulière. Lorsque l’armée française se retira en décembre 1993, des conseillers militaires français restèrent sur place et après la mort du président Habyarimana, tué en avril 1994 dans l’explosion de son avion, c’est au sein de l’ambassade de France à Kigali que fut constitué le gouvernement rwandais qui allait mener le génocide.

Lorsqu’enfin les troupes du Front patriotique rwandais eurent mis en déroute l’armée rwandaise et les milices génocidaires, Paris tenta d’arrêter la progression du FPR en envoyant son armée dans ce qui fut appelé l’opération Turquoise. Celle-ci laissa mourir les Tutsis qui se cachaient dans les marais, mais protégea les génocidaires en fuite en créant pour eux une zone refuge d’où ils purent passer avec armes et bagages au Congo voisin et y semer la terreur.

Vingt-six ans après, la lumière se fait. Une partie des responsables français sont morts, à commencer par Mitterrand. La politique française a changé et Macron essaie de se rapprocher du Rwanda dirigé par Paul Kagamé, l’ancien leader du FPR en 1994. Il lui faut donc tenter d’apurer le passé. Mais ce qui ne change pas, c’est la faculté des dirigeants de l’impérialisme français à mentir, à travestir leurs crimes en prétextant intervenir militairement pour le bien de la population. En Centrafrique l’armée française a été envoyée prétendument pour éviter un génocide, au Mali elle allait « sauver des vies humaines », alors que la ligne directrice est toujours la défense des intérêts de l’impérialisme, quel qu’en soit le prix, exactement comme ce fut le cas au Rwanda.

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