Mozambique : Total profite, la population souffre20/01/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/01/2738.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Mozambique : Total profite, la population souffre

Total a annoncé qu’il allait retirer une partie de son personnel du site de Cabo Delgado au Mozambique, à cause de l’insécurité. Le groupe pétrolier y est engagé dans un immense projet de gaz liquéfié où il a prévu d’investir 20 milliards de dollars. Mais les attaques de groupes djihadistes ne cessent de se rapprocher de ses installations.

Depuis 2010, la découverte de gigantesques champs gaziers en mer a attiré dans la région les principales compagnies pétrolières mondiales. Total, ExxonMobil, ENI se partagent l’essentiel du gâteau, financés par le gratin des banques mondiales. Les réserves sont estimées à 5 000 milliards de mètres cubes, du même niveau que celles du Nigeria, où se trouvaient jusqu’à maintenant les principaux gisements d’Afrique.

Rien dans ce pactole ne profitera à la population du Mozambique. Le gaz extrait en mer, après avoir été liquéfié dans une usine sur la côte, sera exporté en Europe ou en Asie. Des contrats pour la construction de 19 méthaniers géants viennent d’être signés à cet effet avec les armateurs japonais ou grecs. Il en sera du Mozambique comme du Nigeria qui, bien qu’étant le premier producteur de pétrole d’Afrique, doit importer la quasi-totalité de celui qu’il consomme, faute de raffineries dignes de ce nom.

Les revenus fiscaux générés par les sommes que les compagnies pétrolières voudront bien déclarer iront dans la poche des dirigeants du pays et ne serviront certainement pas, contrairement aux déclarations hypocrites du FMI, à « réduire drastiquement la pauvreté ». Le Mozambique est l’un des 25 pays les plus corrompus du monde et ses finances ne se sont pas encore relevées du scandale de la « dette cachée », lorsqu’on apprit en 2016 que l’État avait emprunté dans la plus totale opacité 1,7 milliard d’euros pour l’achat de navires. Les compagnies pétrolières arrosent généreusement l’élite gouvernementale pour arracher un champ de production en mer, un emplacement sur terre ou la protection de l’armée.

La population pour sa part a déjà pu mesurer les maux qu’allait lui apporter l’arrivée des compagnies pétrolières. De nombreux paysans et pêcheurs ont été expulsés de leurs villages pour faire place aux nouvelles installations. Des groupes djihadistes, alimentés en recrues par toutes ces frustrations, ont pris de plus en plus d’ampleur. Ils attaquent les installations et le personnel des compagnies pétrolières, et persécutent les villageois. Celles-ci entretiennent pour se protéger de véritables petites armées : hommes des entreprises françaises dites de sécurité, mercenaires sud-africains ou russes du groupe Wagner. Les villageois, eux, n’ont aucune protection et tentent de survivre entre les exactions des djihadistes et celles de l’armée mozambicaine. Le conflit a déjà fait 4 500 victimes, et 250 000 déplacés ont dû quitter leur foyer.

Avec le capitalisme, la découverte de richesses dans un pays pauvre est un pactole pour les trusts et les élites dirigeantes, mais une calamité pour la population.

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