Leur société

Saint-Denis – Francs-Moisins : logements en voie de démolition, locataires abandonnés

Depuis plusieurs années, la mairie de Saint-Denis a le projet de détruire des bâtiments HLM de la cité des Francs-Moisins, qui rassemble 9 000 personnes et 1 800 logements. 477 démolitions d’appartements sont prévues ainsi que 591 nouvelles constructions, dont 80 % en accession à la propriété, ce qui ferait tomber la part de logements sociaux de 100 % à 83 % sur l’ensemble de cette cité.

Deux bailleurs, l’un privé, Logirep, l’autre public, Plaine-Commune-Habitat, dont le maire est le président, se partagent la transformation de la cité.

Les locataires des bâtiments B1, B2, B4, B7 restent toujours dans l’expectative sur les conditions de relogement. Ceux relevant du bailleur privé Logirep ont reçu un courrier affirmant qu’ils seraient relogés, mais ni date ni lieu ne sont précisés. Il y est indiqué que seraient relogés ceux qui ont entamé les démarches de régularisation du paiement du loyer. Étant donné que plus de 53 % des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté, cela veut dire des difficultés et beaucoup d’anxiété.

Un collectif des habitants des Francs-Moisins et du Conseil des citoyens a invité les représentants de la mairie et de Logirep à répondre aux questions d’une centaine d’habitants, présents lors d’une réunion jeudi 5 mars à la médiathèque du quartier. Interpellant l’élu et le représentant de Logirep, les locataires inquiets ont exprimé leur manque de confiance face aux garanties de relogement qui leur sont données. L’un d’eux a dénoncé l’hypocrisie de telles déclarations, révélant des expulsions locatives en cours, l’absence de réparations et d’entretien des parties communes des bâtiments. Cela a obligé l’élu chargé de la démolition des logements à reconnaître les faits. Les habitants ont bien le sentiment que leur sort au final n’est le souci prioritaire ni du représentant de la mairie ni de Logirep, et ils l’ont fait savoir.

C’est que le choix de la mairie s’inscrit dans le cadre d’une politique générale du logement de l’État. Avec les gouvernements de gauche des années 1980-90, la démolition et la vente de logements sociaux ont fait partie des projets de rénovation urbaine. Mais ceux-ci camouflent souvent la volonté de changer la population, en repoussant plus loin les habitants les plus pauvres et les classes populaires.

Les premières grandes démolitions datent des années 1980 avec celle notamment de la barre Debussy à La Courneuve en 1986, où 360 logements ont été détruits. De 2004 à 2014, selon les chiffres fournis par l’Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine), 151 500 démolitions ont été réalisées. Dans une circulaire datée du 22 octobre 1998, il était stipulé : « La démolition peut être pleinement justifiée, voire nécessaire, pour permettre la mise en œuvre de projets urbains et sociaux de qualité. » Et il est bien peu probable que ceux dont l’appartement a été démoli aient eu droit en retour à un logement de qualité.

Les subventions de l’État risquent ainsi, à Saint-Denis et ailleurs, d’être une aide, non à l’amélioration, mais à la démolition du logement social.

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