Portugal : quand les routiers cessent de livrer le carburant28/08/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/08/2665.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Portugal : quand les routiers cessent de livrer le carburant

La grève des routiers assurant la livraison des carburants a pris fin dimanche soir 18 août. Elle a montré le mécontentement de ces travailleurs et leur rôle indispensable dans l’économie.

La grève a démarré lundi 12 août, quatre mois après un mouvement sur les mêmes revendications, en avril. Les 800 conducteurs du secteur revendiquent des augmentations de salaire et de primes : un salaire de base passant de 700 euros aujourd’hui (en principe) à 1 000 euros en 2025, une revalorisation de la prime de risque (7,5 euros par jour actuellement), une meilleure prise en compte des heures supplémentaires, du travail de nuit et du week-end, enfin la création d’une catégorie spécifique, à part des autres conducteurs de poids lourds.

Le gouvernement socialiste d’Antonio Costa, en place depuis quatre ans, se flatte d’avoir sauvé le pays de la faillite, redressé l’économie, les comptes publics, et presque ramené le plein emploi. Comme les infirmiers ou les enseignants avant eux, après près de vingt ans sans augmentations salariales, les chauffeurs voudraient bien profiter un peu de ce retour tant vanté à la prospérité.

La grève a eu des effets avant même son déclenchement : une bonne partie des stations-service ont été asséchées par les automobilistes qui se sont précipités pour faire le plein. Aussitôt, le gouvernement a imposé aux grévistes un service minimum, sous menace de prison et d’amendes. Ce minimum allait jusqu’à 100 % pour les secteurs déclarés stratégiques : au mois d’août, cela comprend aussi le tourisme, en particulier dans l’Algarve, tout au sud du pays.

Les grévistes ont globalement respecté ce service minimum. Mais ils ont appliqué strictement la loi : journée de travail, pauses, vitesses, etc. Ce fut le chaos, car les chauffeurs roulent fréquemment 15 à 18 heures par jour, week-ends compris, ce qui leur permet en moyenne de gagner 1 400 euros par mois, primes comprises.

Dès le lundi soir, sous prétexte d’infractions au service minimum, le gouvernement a décrété la réquisition. Il a mobilisé policiers et gendarmes pour encadrer les convois de carburant et, au besoin, pour conduire les camions. Une partie des syndicats du secteur ont alors demandé d’arrêter la grève, à laquelle ils n’avaient parfois pas appelé.

Après avoir au départ critiqué les grévistes, le Parti communiste et le Bloc de gauche (issu de formations d’extrême gauche) ont commencé à reprocher mollement au gouvernement socialiste d’attaquer le droit de grève. En vue des élections législatives d’octobre, PC et Bloc sont en concurrence avec le Parti socialiste. Aujourd’hui minoritaire au Parlement et dépendant du soutien des députés du PC et du Bloc, le PS espère devenir majoritaire et ne plus dépendre de ces alliés, pourtant peu exigeants.

La grève a continué, même si elle n’était plus menée que par un seul syndicat, et soutenue par des courants syndicaux minoritaires. Le patronat du secteur exigeait la reprise du travail pour négocier. Le gouvernement pesait dans le même sens. Dimanche 18 août, une assemblée générale a décidé l’arrêt de la grève et la participation à une réunion de négociation avec les patrons mardi 20, en présence de représentants du gouvernement.

Les patrons n’ont rien voulu céder, et le syndicat prépare maintenant une grève des heures supplémentaires, dimanches et jours fériés.

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