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Réseau ferroviaire : obsolescence programmée
Un rapport confidentiel de l’Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) a été divulgué par Le Parisien. Il confirme que le réseau ferré national continue de se dégrader, après quatre décennies d’abandon.
L’EPSF a réalisé une enquête, entre avril et mai 2019, concernant la maintenance et la sécurité électrique sur 14 000 km, soit près de la moitié du réseau. Sur 413 anomalies de signalisation électrique enregistrées par la SNCF pouvant mettre en cause la sécurité des circulations, l’EPSF révèle que 80 n’ont pas été réparées dans les délais réglementaires, parfois même au bout d’un an. Ainsi les enquêteurs ont découvert des fils électriques rongés sur un passage à niveau et laissés en l’état. Or en 2014, à Denguin, près de Pau, une collision entre un TER et un TGV avait fait 40 blessés, suite à un défaut de signalisation dû à l’action de rongeurs sur les gaines d’isolement des câbles, suivant le rapport de la SNCF. Un cadre cheminot interrogé par le quotidien dit à juste titre : « On dirait que nous n’avons rien appris de l’accident de Denguin. »
Il en va de même pour l’entretien des voies. Des centaines d’anomalies ont été identifiées par la SNCF mais n’ont pas été traitées dans les délais, faute de moyens et d’effectifs. Ainsi, les enquêteurs ont observé des éclisses, les pièces reliant deux rails, avec des boulons desserrés. C’est exactement la cause du déraillement de Brétigny en 2013, qui avait fait sept morts et plus de 30 blessés.
Une bonne partie du réseau est aujourd’hui obsolète en raison des coupes dans les budgets et dans les effectifs d’entretien depuis plusieurs décennies.
Dès les années 1980, les budgets de maintenance ont chuté en moyenne de 3 % par an en valeur réelle. Le nombre de kilomètres de voies renouvelés annuellement était divisé par deux par rapport aux années 1970. En 2005, un audit de polytechniciens de Lausanne indiquait que, en continuant à ce rythme, les deux tiers du réseau allaient disparaître à l’horizon 2025. Réseau ferré de France augmenta ses péages pour financer l’entretien de l’infrastructure, mais l’État en profitait pour diminuer d’autant ses dotations. Malgré des décisions de rénovation depuis 2011, le réseau continue de vieillir. Il faudrait embaucher massivement pour compenser les dizaines de milliers de suppressions d’emplois à l’infrastructure dans cette même période.
Mais les effectifs continuent de baisser à SNCF Réseau. En outre, avec le recours de plus en plus massif à la sous-traitance, à l’éclatement dans des entreprises distinctes, la transmission de compétences devient de plus en plus problématique.
Pour les usagers, les travaux, organisés en urgence et à l’économie, signifient bien souvent la fermeture partielle ou totale de nombreuses lignes pendant plusieurs mois. Et sur 5 600 kilomètres de lignes, plus du quart du réseau, la vitesse est réduite en raison de l’état catastrophique de la voie.
Non seulement la bourgeoisie n’investit plus mais, avide d’argent public, elle a dissuadé l’État de le faire. Encore plus que le réseau ferré, c’est le capitalisme qui est obsolète.