Dans le monde

Argentine : un tortionnaire réfugié en France devrait être extradé

Un décret, signé le 24 octobre, vient d’autoriser l’extradition de Mario Sandoval, un tortionnaire argentin qui avait fui l’Argentine à la fin de la dictature en 1983 et trouvé refuge en France. Il avait été naturalisé en 1997 et avait fait carrière dans le monde universitaire.

Ce décret est le terme d’un marathon judiciaire qui a duré six ans. En 2012, un juge argentin avait lancé une procédure contre cet ancien policier qui a exercé ses talents de tortionnaire et de meurtrier dans la sinistre École supérieure de mécanique de la marine (ESMA) de Buenos Aires. Rien que dans ce camp militaire au sein de la capitale, 5 000 personnes furent assassinées pendant les sept années de dictature.

Les personnes arrêtées, des ouvriers militants, des membres des organisations péronistes ou d’extrême gauche, y étaient torturées puis assassinées. Généralement, pour les tuer, on les droguait avant de les jeter depuis des avions au-dessus du Rio de la Plata, afin de faire disparaître leurs cadavres dans l’océan Atlantique. Les militantes enceintes avaient un sursis jusqu’à leur accouchement, puis elles subissaient le même sort. Quant aux enfants, les militaires les répartissaient soit dans leurs rangs, soit auprès de familles bourgeoises. Cette « gestation pour autrui »-là ne scandalisait ni la droite ni l’extrême droite argentine.

Mario Sandoval est soupçonné d’avoir participé à quelque six cents crimes de cette nature. Mais c’est une seule affaire qui a conduit à son extradition : l’arrestation d’un étudiant, depuis disparu. Des témoins attestent que le policier s’est nommé lors de l’arrestation. Depuis 2012, les juridictions françaises se sont livrées à une valse-hésitation, les unes décidant l’extradition, les autres la rejetant. Au final, l’acquisition de la nationalité française n’aura pas servi de protection pour un crime commis antérieurement.

À cette occasion, on a appris qu’un « migrant » de cette espèce a été accueilli avec humanité. Il a pu passer un doctorat en sciences politiques et enseigner dans des établissements universitaires prestigieux. La tradition d’accueil, que l’État français piétine par ailleurs, n’a donc pas entièrement disparu. À moins que ce ne soit en hommage au général français Paul Aussaresses, formateur actif sur le continent américain de « l’école française de la torture », où de nombreux officiers et policiers des dictatures sud-américaines étaient venus faire leurs classes...

Il reste à savoir si ce décret sera appliqué.

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