Dans le monde

Venezuela : menaces contre le régime et la population

Vendredi 14 septembre, Luis Almagro, le secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), qui fédère 35 pays sous la houlette de Washington, a déclaré que son organisation n’excluait pas d’intervenir militairement au Venezuela pour renverser le régime de Nicolas Maduro.

Cette déclaration a provoqué aussitôt une réaction des dirigeants chavistes mais aussi de onze États membres de cette organisation, opposés à toute intervention militaire et dénonçant l’ingérence de l’OEA.

Selon l’ONU, sur les 2,3 millions de Vénézuéliens vivant à l’étranger, plus de 1,6 million auraient fui depuis 2015, dont un million en Colombie, qui en a déjà régularisé 820 000. Si cette migration a d’abord été celle des plus aisés, elle touche maintenant les classes populaires, qui fuient une situation d’extrême pénurie où manquent les produits de première nécessité, aliments et médicaments. L’arrivée de ces migrants a déclenché au Brésil des réactions xénophobes. Face à quoi, onze pays d’Amérique latine proposent à Caracas d’accepter une aide humanitaire, destinée d’abord à endiguer cette migration, et que le régime chaviste refuse jusqu’à présent.

Les déclarations du secrétaire de l’OEA font suite à celles, similaires, du président des États-Unis en août dernier. Elles avaient alors conduit une poignée d’officiers vénézuéliens à prendre contact avec son administration. Mais, Washington leur ayant refusé du matériel de communication crypté, ces contacts ont pris fin. Le porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, Garrett Marquis, a pu ainsi redire, ces jours-ci, « la préférence politique des États-Unis pour un retour pacifique et ordonné à la démocratie au Venezuela ».

Le porte-parole de l’OEA prétend que le « retour à la démocratie » au Venezuela résoudrait ses difficultés. Certes, le régime mis en place il y a près de vingt ans par Hugo Chavez et ses partisans n’est pas un modèle en la matière, mais les problèmes ne seront pas réglés par sa chute, car le sort des classes pauvres importe peu aux dirigeants des grandes puissances, d’abord soucieux de leurs multinationales.

Le grand tort du Venezuela reste, aux yeux de Washington, de la bourgeoisie vénézuélienne et de ses adversaires dans le monde, d’avoir montré que la rente pétrolière peut ne pas être exclusivement réservée aux classes riches, sans qu’il y ait pour autant quoi que ce soit de socialiste dans ce choix.

Dans la période où le prix du baril de pétrole frisait les 150 dollars, le régime assurait des missions favorables à la population en ce qui concerne l’alimentation, la santé, l’éducation, sans que cela remette en cause le pouvoir de la bourgeoisie. En revanche, quand le prix du baril a été divisé par trois, le régime important la majorité des produits de première nécessité, la question du ravitaillement est devenue aiguë.

Depuis trois ans, les rayons des supermarchés sont vides et, pour les classes populaires, survivre est devenu très difficile. La dégringolade des recettes de l’État vénézuélien a alourdi sa dette. Les dirigeants chavistes ne sont pas exempts de critiques, puisque certains n’ont pas manqué d’utiliser leur position pour s’enrichir. Mais les difficultés actuelles sont d’abord la conséquence du système impérialiste qui étrangle les pays les plus pauvres.

Aujourd’hui que le régime chaviste est fragilisé, les mêmes qui, lors de son avènement, avaient tenté de le renverser par la force, sans y réussir, peuvent être tentés de récidiver. Mais la fin du régime chaviste et un prétendu « retour de la démocratie », sous le patronage de la bourgeoisie vénézuélienne et de Washington, ne sauveraient pas les classes populaires.

Leur intérêt serait non seulement de l’empêcher, comme elles l’ont fait déjà en 2002, mais aussi d’avancer face au régime leurs propres exigences.

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