Même les bananes sont plus chères aux Antilles qu'en France25/02/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/02/une2117.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Même les bananes sont plus chères aux Antilles qu'en France

La Guadeloupe et la Martinique sont des régions où la vie est chère, très chère. Le LKP en Guadeloupe et le Comité du 5 février en Martinique réclament une baisse importante sur les produits de première nécessité, et l'énoncé de quelques prix pratiqués là-bas montre le caractère vital de cette revendication.

L'alimentation est un luxe

Les prix des produits alimentaires sont beaucoup plus élevés que ceux pratiqués dans les commerces de l'hexagone, avec des différences parfois énormes. Les pâtes sont deux fois plus chères. Le prix du paquet de café de marque est multiplié par deux ou deux et demi. L'association de consommateurs CLCV a demandé à son association antillaise de relever les prix de produits de marque dans les grandes surfaces en Martinique. Par comparaison à la France, sur huit produits, la différence est... du simple au double. Les Cora, Carrefour ou autre Système U, filiales des grands distributeurs français, font très largement leur beurre. Même le poisson frais, comme le vivaneau, qui faisait partie des habitudes alimentaires, atteint parfois 20 euros le kilo dans les supermarchés. La viande fraîche est également inabordable. Du coup, la majorité des Antillais se rabattent sur des morceaux de volailles ou de poissons surgelés. Et les produits locaux comme les tomates se trouvent en ce moment à 6 euros le kilo. Quand aux bananes, elles sont plus chères qu'en France !

Les sociétés françaises profitent de leur monopole

Mais la vie chère, ce n'est pas seulement l'alimentation. Tout, quasiment tout est beaucoup plus cher. Tout ce qui vient de France, car la grande distribution, les gros importateurs et les professionnels du fret comme la CMA-CGM se sucrent au passage. Cette compagnie maritime possède un quasi-monopole sur le transport maritime. Et ses tarifs pèsent sur les prix antillais. Ainsi, le coût de transport d'un conteneur entre la France et la Martinique serait trois fois plus cher qu'un trajet France-Chine. Mais également les loyers et l'essence qui ont été parmi les causes premières du mécontentement. Jusqu'en décembre dernier, pour le sans-plomb ou le gazole, la différence dépassait les 60 centimes d'euro le litre. Un rapport gouvernemental sur la filière pétrolière a pointé les aberrations de la fixation des prix, rapport qui a obligé Jégo à parler de « l'enrichissement sans cause des compagnies pétrolières ». En effet, le prix de vente est calculé en fonction d'une formule administrative complètement opaque. Le résultat, c'est que la SARA, filiale à 50 % de Total, qui a le monopole de l'essence aux Antilles, engrange des profits énormes avec l'appui de l'administration. Le même rapport gouvernemental note : « Longue liste d'anomalies, chiffres non justifiés, formules peu calées sur la réalité des coûts, tout cela conduit à penser que la crédibilité du dispositif actuel est atteinte. ». N'empêche, des sociétés bénéficient grâce à l'État français d'un monopole de fait, et s'enrichissent sans vergogne sur le dos d'une population victime. »

Ce qui est vrai pour les produits pétroliers l'est également dans bien d'autres domaines, les transports aériens par exemple.

Air France a pendant longtemps profité du monopole qu'elle avait sur les lignes entre Paris et les Antilles, elle continue à imposer des tarifs prohibitifs.

Les filiales des grandes banques françaises pratiquent des tarifs exorbitants sur les opérations bancaires. Christine Lagarde, la ministre de l'Économie qui feint de le découvrir, a solennellement annoncé qu'elle demanderait des comptes aux banques, qui bénéficient d'une aide publique dans les DOM. Au détour, on découvre un nouvel exemple de l'arrosage étatique des patrons antillais.

Oui, les survivances du système colonial subsistent. Elles bénéficient d'abord à la toute petite minorité de békés, héritiers pas si lointains des colonialistes esclavagistes blancs du 19e siècle. Ceux-ci représenteraient, en Martinique, 1 % de la population mais posséderaient 50 % des terres agricoles, 40 % des grandes surfaces, toutes les responsabilités économiques. Les patrons, ce sont eux, comme Bernard Hayot, qui fait 1,6 milliard de chiffre d'affaires.

Mais ce système profite également à de multiples grands groupes métropolitains. Et grâce à l'État qui veut maintenir cette chasse gardée, tous se mettent d'accord pour rançonner encore et encore la population antillaise.

Partager