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Venezuela : un gouvernement de plus en plus dépendant de l’armée
Depuis avril dernier, le Venezuela traverse une crise politique opposant le régime chaviste et l’opposition de droite. Cette dernière a organisé de multiples manifestations, que le gouvernement a réprimées violemment. À ce jour, ces affrontements auraient fait 70 morts.
À la racine de cette crise, il y a l’effondrement du prix du baril du pétrole et l’endettement du régime chaviste. Pendant la présidence de Hugo Chavez, de 1999 à 2013, le prix du baril s’est envolé, passant de 8 dollars à 150 dollars, générant une manne pétrolière évaluée à 1 100 milliards de dollars. Une part de ce pactole a permis de lancer divers programmes sociaux en faveur des classes les plus déshéritées pour l’alimentation, la santé, l’éducation ou le logement. C’est ce qui a fait la réputation du régime chaviste. Mais cette manne a aussi enrichi les dirigeants.
L’économie est restée fondamentalement dépendante de la production d’hydrocarbures. Les produits de première nécessité, les denrées alimentaires et les médicaments sont importés. Pour retarder les effets de la baisse du prix du baril, le régime chaviste s’est endetté, au point qu’actuellement la moitié des recettes du pétrole servent à payer la dette. Pour la population, cela a entraîné une situation de pénurie, qui rend la vie quotidienne très difficile, entraînant parfois des émeutes dans les supermarchés et le développement du marché noir.
L’opposition de droite, qui cherche depuis des années à renverser le régime chaviste, tente de prendre la tête du mécontentement. Le chaviste Nicolas Maduro a succédé au président Hugo Chavez, emporté par un cancer. Mais en 2015 la droite a remporté les élections législatives. Le régime a riposté en muselant le Parlement.
Les deux camps s’accusent de fomenter un coup d’État. Un membre de la police a survolé en hélicoptère le siège de la Cour suprême et y a jeté quelques grenades. Attaque réelle ou coup monté des chavistes ? Les deux camps se renvoient la balle. Le 5 juillet, le vice-président, à la tête d’un groupe de chavistes, a fait irruption dans le Parlement pour y dénoncer l’emprise de la droite. Cette dernière espère maintenant qu’un référendum va lui donner raison.
Depuis que le civil Nicolas Maduro a succédé au militaire Chavez, l’armée a pris de plus en plus d’emprise. Derrière Maduro plane désormais l’ombre du général Padrino Lopez, le numéro deux du régime.
Depuis 2013, les militaires ont pris des positions dans le système économique. Ils gèrent une banque, une société de fret aérien, maritime et terrestre, une entreprise agricole, leur propre société de prospections minières, pétrolières et gazières et une chaîne de télévision. Pour faire face aux pénuries, dix-huit généraux ont été mis en place pour diriger la production, l’importation et la commercialisation des produits essentiels, ce qui a engendré des trafics dont bénéficient les militaires.
En janvier dernier, la Cour suprême a rendu impossible le contrôle des activités économiques dépendant de l’armée. En outre, des militaires sont impliqués dans le narcotrafic. Le pouvoir chaviste prend de plus en plus les traits, familiers en Amérique latine, d’une dictature militaire corrompue.
L’opposition de droite et d’extrême droite s’appuie sur cette évolution pour se présenter comme une opposition démocratique et dénoncer la corruption. C’est évidemment paradoxal car, si elle-même arrivait à ses fins, elle restaurerait le Venezuela d’antan, quand la manne pétrolière profitait surtout à la très grande bourgeoisie et à ses laquais politiques.
C’est dire que les travailleurs n’ont rien à attendre du bras-de-fer opposant les chavistes et la droite.