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Leur société
Le nucléaire : marché profitable et enjeu électoral
Les polémiques autour de la fermeture de la centrale de Fessenheim ont relancé les discussions sur la place de l’énergie nucléaire dans la production d’électricité.
Les candidats à la présidentielle promettent la réduction du nucléaire, voire pour certains son abandon à court terme. Il en va du nucléaire comme de l’emploi ou du pouvoir d’achat : tous promettent de s’en occuper mais, une fois au pouvoir, tous s’alignent derrière les intérêts des capitalistes, qui ont le véritable pouvoir de décision.
L’énergie nucléaire représente en France 75 % de la production d’électricité, contre 10 % en moyenne dans le monde. C’est le fruit des choix faits par l’État dans les années 1970, qui étaient de favoriser cette technique au nom de l’indépendance énergétique de la France, oubliant que l’uranium est extrait au Niger, plus au cœur de la Françafrique que de l’hexagone. Ce choix a offert pendant des décennies un marché aux rois du BTP et à toute la filière nucléaire, qui va de la construction et la maintenance des réacteurs au traitement du combustible et des déchets.
C’est encore la défense des intérêts d’Areva et de Bouygues qui décida Jospin, avec l’écologiste Voynet comme ministre, à construire l’EPR à Flamanville. Avec un coût passé de 3 à 10 milliards d’euros, cela se solde par un gouffre financier, doublé d’un fiasco technologique, avec des malfaçons et une livraison qui a pris dix ans de retard. Nul ne sait si l’EPR produira un jour de l’électricité !
Depuis la construction des premières centrales, le nucléaire a suscité une forte opposition d’une fraction de la population. À ses yeux, les dangers (risques d’accidents graves et déchets radioactifs) sont pires que les avantages (absence de contribution au réchauffement climatique et puissance de la production). La catastrophe de Tchernobyl en 1986 et celle de Fukushima en 2011, faisant des milliers de victimes, rendant de vastes zones inhabitables et sacrifiant les travailleurs chargés d’intervenir, ont renforcé les détracteurs du nucléaire.
Mais, plus encore que les dangers du nucléaire, Fukushima a démontré l’irresponsabilité d’une entreprise privée comme Tepco, prête à falsifier des rapports avec la complicité des autorités, pour ne pas amputer ses profits. Même si l’État reste son actionnaire majoritaire, EDF fonctionne avec la même logique de rentabilité, supprimant des emplois pour dégager des profits. Elle a recours à la sous-traitance et exploite les « nomades du nucléaire », qui subissent l’essentiel des radiations lors de la maintenance des installations. Elle entretient l’opacité sur l’état de celles-ci.
Le secret industriel, la recherche du profit et l’exploitation caractérisent en fait toute l’économie capitaliste et, des mines de charbon à l’amiante, elle est la cause de multiples catastrophes, pollutions ou maladies. Mais, parce qu’elle menace bien au-delà de ceux qui la mettent en œuvre, l’industrie nucléaire suscite davantage de mobilisations et de rejets.
De nombreux responsables politiques utilisent cette inquiétude de la population comme argument électoral et finissent par se dire tous écologistes. Ils promettent de réduire la part du nucléaire, voire, comme Mélenchon, d’en sortir d’ici 2050. En 2012, Hollande avait promis la fermeture de la centrale de Fessenheim, une des plus anciennes centrales, installée dans une zone sismique inondable. La promesse n’a pas été tenue. En tergiversant, Hollande aura ainsi réussi à se mettre à dos aussi bien les travailleurs, qui craignent légitimement pour leur emploi, que les riverains, inquiets pour les dangers !
Produire de l’électricité sans menacer la santé des travailleurs ou celle de la population et sans détruire la nature serait possible. Ce n’est pas seulement une question technique. Cela nécessiterait d’exproprier les grandes entreprises qui dominent la production de l’énergie, nucléaire ou pas, pour les placer sous le contrôle direct et conscient des travailleurs, des consommateurs et des riverains des installations.