Grossièreté présidentielle : insulter pour diviser12/01/20222022Journal/medias/journalarticle/images/2022/01/P3-2_Paris_le_11_janvier_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C1019%2C2362%2C2348_crop_detail.jpg

Leur société

Grossièreté présidentielle : insulter pour diviser

La sortie de Macron déclarant le 5 janvier avoir « très envie d’emmerder les non-vaccinés » était tout sauf spontanée. Il l’a d’ailleurs revendiquée à plusieurs reprises depuis lors.

Illustration - insulter pour diviser

Le samedi suivant l’interview, le 8 janvier, il y avait plus de cent mille manifestants mobilisés contre le passe sanitaire et les injures présidentielles, soit quatre fois plus que lors de la précédente journée de manifestation. C’était prévisible et probablement prévu par l’Élysée, le choix du vocabulaire lui-même visant à faire du bruit et même à faire réagir les opposants. Lorsque le président des riches veut faire peuple, voire sincère, il se fait grossier, peut-être sur suggestion de conseillers qui coûtent un « pognon de dingue ». Cela en dit long sur le mépris avec lequel il considère le peuple en question.

Au-delà de la volonté d’être sans cesse sur le devant de la scène et de s’autoféliciter de son action, Macron cherche systématiquement à diviser. Après ou en même temps que les oppositions travailleur-chômeur, retraité-actif, public-privé, jeune-vieux, français-immigré, c’est l’opposition entre vaccinés et non-vaccinés que le pouvoir veut creuser.

En faisant porter la responsabilité de l’épidémie, et de son nouveau développement, sur les cinq millions de non-vaccinés, il veut tenter d’échapper à ses propres responsabilités. L’État n’a rien fait, au contraire, pour mettre les services de santé en état de combattre. Il a laissé, conjointement avec les gouvernements des autres grandes puissances, les trusts pharmaceutiques gérer la crise en fonction de leurs seuls intérêts. Avare de ses moyens, l’administration s’est bornée depuis deux ans à abreuver la population d’ordres et de contre-ordres, de menaces et de paperasses. Mais, pas plus dans les entreprises que dans les écoles et les municipalités, on n’a donné aux premiers intéressés la possibilité de s’organiser eux-mêmes et de résoudre les problèmes concrets.

Bien sûr, il est souhaitable d’élargir le plus possible la vaccination, quoique le déroulement de l’épidémie montre qu’elle ne résout pas tout. Le fait que la moitié de la population mondiale n’y a pas accès permet l’apparition incessante de variants. Elle ne remplace pas non plus les services hospitaliers insuffisants. Quant à convaincre les personnes réticentes de se faire vacciner, les pressions et les insultes dignes d’un adjudant ne remplacent pas l’encadrement médical, l’action sanitaire et la proximité avec la population. Des millions de personnes n’ont accepté le vaccin que par lassitude et des millions d’autres en sont écartées par ignorance, ou tout simplement parce qu’elles vivent en dehors, dans la grande pauvreté, l’isolement, la marginalité. La déclaration présidentielle n’amènera pas un seul de ceux-là à aller se faire vacciner. Ce n’était d’ailleurs pas son but.

La provocation de Macron est aussi une opération politique. Accusant les non-vaccinés, il oblige ses concurrents des partis de gouvernement à se ranger derrière lui en approuvant la nouvelle mouture du passe sanitaire. Il compte que l’épidémie ira en s’atténuant et qu’il pourra, contre toute vérité, se présenter à l’élection comme celui qui a su gérer la crise. Rejetant avec mépris une partie de la population dans les ténèbres réactionnaires, étalant sa morgue d’homme bien né et bien éduqué, Macron pose facilement au défenseur de la science, de la médecine et du progrès. Il n’est que le défenseur de l’ordre social en général et des intérêts de sa coterie politique en particulier.

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