Espagne : Une régression sociale pour sauver les profits31/10/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/11/une2361.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Espagne : Une régression sociale pour sauver les profits

Les dirigeants du Parti populaire (PP), le parti de droite au pouvoir en Espagne depuis deux ans, se disent satisfaits de l'évolution de la situation économique et financière du pays. Ils estiment que la politique d'austérité aurait porté ses fruits et permettrait à l'Espagne d'échapper au plan de sauvegarde dont les autorités européennes la menaçaient.

Le chef du gouvernement, Mariano Rajoy, se vante de ce succès. Il n'est pas le seul à se frotter les mains. Les banquiers et le grand patronat reconnaissent sans complexe que non seulement les profits sont au rendez-vous, mais qu'en réalité ils n'ont jamais cessé de l'être. Grâce aux 249 milliards d'aides venues de l'Europe et de l'État espagnol depuis 2008, et dont les banquiers ont été les principaux bénéficiaires, bien sûr. Mais grâce aussi à tous les sacrifices qui ont été imposés aux classes populaires pour permettre au pays d'échapper à la banqueroute. Un chantage dont le gouvernement continue d'user et abuser pour racketter la population.

En tout cas, il y a au moins un heureux en Espagne, le président du Banco de Santander, Émilio Botin, qui n'en finit pas de manifester son optimisme. Ce numéro un de la banque espagnole, impliqué dans le passé dans une affaire de fraude fiscale de plusieurs milliards de dollars, déclarait à New York : « C'est un moment fantastique pour l'Espagne. L'argent arrive de toutes parts. (...) La confiance dans l'Espagne a augmenté de façon inimaginable. » Et d'ajouter entre autres que, si tout va si bien pour les capitalistes, c'est grâce aux aides que les institutions européennes et l'État leur ont prodiguées ainsi qu'aux bienfaits de la spéculation boursière.

Au passage, Botin rend aussi hommage à la politique sociale du gouvernement de Rajoy, qui aurait mis en place une formidable politique de coupes budgétaires et une réforme du Code du travail qui a contribué à diminuer de façon importante les dépenses salariales. Comme quoi même un banquier arnaqueur peut énoncer une vérité : depuis des années dites de crise, ce sont les classes populaires qui supportent seules le poids de la crise.

C'est une réalité que les données de l'Institut national de la statistique illustrent. Selon elles, le montant global des salaires a baissé d'environ 7 % au cours de l'année écoulée. Or les instances patronales estiment que la baisse des salaires va encore s'aggraver dans l'année à venir et espèrent inciter les capitalistes d'Espagne ou d'autres pays à venir investir, afin de relancer la machine économique. En guise d'appât, ils prétendent que la force de travail en Espagne sera de quelque 20 % meilleur marché qu'en France, en Allemagne ou même en Italie. Ils disent d'ailleurs espérer que le profit que le patronat pensait tirer de chaque travailleur augmenterait de 6,7 % en deux ans (au lieu de 1,5 % dans les pays européens voisins). Voilà l'espoir du patronat et des banquiers : baisser les salaires et continuer de jeter à la rue des travailleurs au rythme des restructurations, des fermetures d'entreprises et des réductions d'effectifs dans les services publics.

Voilà de quelle régression sociale est fait l'optimisme des capitalistes et des dirigeants politiques à leurs ordres. Aujourd'hui, il y a des réactions dans différentes couches de la société : parmi les enseignants, les fonctionnaires, les jeunes, les précaires, les étudiants, les petits commerçants sans clients, les médecins, le personnel hospitalier. Il se manifeste aussi dans des entreprises. Il faut que ces mécontentements se développent et que leurs luttes imposent des reculs au patronat et au gouvernement.

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