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Congo RDC : changer de président pour que rien ne change
Les élections présidentielles en République démocratique du Congo qui se sont déroulées dimanche 30 décembre auraient dû avoir lieu deux ans plus tôt. Le dictateur Joseph Kabila avait alors réussi à les repousser, réprimant sauvagement les manifestations qui réclamaient son départ.
Ce report n’a pas permis à Kabila de briguer un troisième mandat, ce que craignait alors la population, mais lui a laissé le temps d’organiser sa succession. De leur côté les grandes puissances ont œuvré pour qu’il passe la main, craignant que la haine accumulée contre son régime ne déborde dans la rue et n’aboutisse à un embrasement généralisé du pays, compromettant le pillage des ressources minières par les multinationales.
C’est en effet de RDC que provient une grande partie des matériaux utilisés par l’industrie moderne pour produire ordinateurs, téléphones portables ou batteries automobiles. On y trouve à profusion tous les minerais, ainsi que les diamants. La richesse de son sous-sol, qui a fait qualifier le Congo de « miracle géologique », n’a jamais profité à la population. Aujourd’hui, sept trusts minéraliers monopolisent 85 % de la production de cuivre, de cobalt et d’or du pays. Ces géants mondiaux du secteur, comme Rangold, Glencore, AngloGold Ashanti, ne versent à la RDC qu’une part dérisoire de leurs revenus, des sommes qui de toute façon n’atteignent jamais la population. Le clan au pouvoir en confisque la totalité, édifiant ainsi des fortunes fabuleuses au regard de la misère dans laquelle vivent les Congolais. La famille Kabila s’est ainsi approprié 120 permis d’exploitation dans les mines pour les rétrocéder moyennant finance aux multinationales. Elle contrôle par ailleurs 70 des principales compagnies congolaises dans tous les secteurs, de l’hôtellerie aux compagnies aériennes.
À côté des fortunes confisquées par le clan présidentiel, la population vit dans la pire misère. À Kinshasa, l’immense capitale, des hordes d’enfants des rues cherchent à longueur de journée de quoi se nourrir et s’abriter. Dans les bidonvilles qui ne cessent de s’étendre, il n’y a ni eau potable ni système d’hygiène minimum, et les maladies y font des ravages. C’est pourtant là que se réfugient les arrivants de provinces où le dénuement est encore pire et où règne l’insécurité. Dans le Nord-Kivu, la population craint autant les groupes armés que l’épidémie d’Ebola qui se développe à nouveau, les équipes sanitaires ne pouvant accéder aux zones à risque.
Ces élections présidentielles se résument donc à savoir quel clan pourra piller le pays. Les Kabila tiennent la place depuis 1997. Joseph Kabila a succédé à son père, Laurent Désiré, qui avait renversé le dictateur Mobutu en place depuis l’indépendance. Il a choisi comme dauphin dans ces élections son ancien ministre de l’Intérieur, Ramazani Shadari, le responsable des tueries de décembre 2016. L’opposition, elle, n’est pas parvenue à se mettre d’accord sur un candidat unique malgré la pression des grandes puissances. Sous couvert d’une fondation, celles-ci en avaient réuni dans un hôtel de Genève les principaux leaders qui s’y étaient partagé les ministères et les postes lucratifs et mis d’accord sur un candidat. Mais dès le lendemain, l’accord volait en éclat.
Deux candidats principaux étaient donc opposés à Shadari. L’un était Martin Fayulu, soutenu par le richissime ancien gouverneur de la province minière du Katanga Moïse Katumbi et par Jean-Pierre Bemba, commanditaire d’horribles tueries dans la Centrafrique voisine. L’autre était Felix Tshisekedi qui portait lui aussi les couleurs de l’opposition. Il était soutenu, en échange de la promesse du poste de Premier ministre, par Vital Kamerhe, qui fut président de l’Assemblée nationale sous Kabila.
Le pedigree de tous ces candidats et de leurs soutiens suffit à prouver que le résultat des élections, quel qu’il soit, ne remettra pas en cause le pillage du pays par les multinationales.