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Éthiopie : la répression contre la révolte

Médaillé d’argent au marathon lors de la dernière journée des JO à Rio de Janeiro, l’Éthiopien Feyisa Lilesa a franchi la ligne d’arrivée les bras levés et croisés, les poings fermés, en signe de soutien aux victimes de la répression en Éthiopie.

Cela a eu le mérite d’attirer l’attention sur la situation politique dans ce pays de plus de 90 millions d’habitants, un des plus peuplés d’Afrique.

Fin 2015, les autorités éthiopiennes ont dû faire face au mécontentement de la population de l’Oromia, proche d’Addis-Abeba, la capitale. Le nouveau projet Master Plan du gouvernement pour agrandir la ville était à l’origine de la colère. Car c’était l’occasion pour le gouvernement de s’accaparer des terres agricoles, afin de pouvoir les vendre ou les louer à de riches particuliers ou à des financiers internationaux.

De 2008 à 2011, l’Éthiopie a ainsi mis en location au moins 3,6 millions d’hectares de terre. À Gambela, dans l’ouest du pays, 42 % des terres cultivables sont commercialisées et proposées à la location aux investisseurs. D’autres régions sont tout autant concernées.

Les paysans ne voulant pas être délogés de leurs terres ont déclenché des mouvements de protestation, rejoints par les populations de villes environnantes. Les autorités ont envoyé la police et l’armée pour les réprimer, faisant au moins 70 morts. Cela a entraîné le soutien des étudiants d’Addis-Abeba au mouvement, ainsi que d’une partie de la jeunesse éthiopienne, qui voit les villes s’agrandir et s’embellir, avec des boutiques modernes pleines de marchandises que les jeunes ne peuvent s’offrir, la majorité d’entre eux étant sans travail.

Depuis 2015, selon les ONG, il y aurait eu des centaines de morts, des dizaines de milliers d’arrestations, des disparitions, et de nombreux cas de tortures. Les 6 et 7 août derniers, Amnesty International a parlé de près de 100 morts et de centaines de blessés, après que la police a tiré sur les manifestants dans plusieurs villes de province. La répression s’ajoute à l’absence de libertés d’expression et d’organisation. Seuls sont permis les journaux muselés, les partis et les syndicats qui ne contestent pas le pouvoir.

Dictature, paysans expulsés des terres, jeunesse en révolte : tous les ingrédients sont réunis pour une explosion sociale.

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