État d’urgence sanitaire : l’exception devient la règle29/12/20202020Journal/medias/journalarticle/images/2020/12/P3-2_Voeux_Macron_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C69%2C748%2C490_crop_detail.jpg

Leur société

État d’urgence sanitaire : l’exception devient la règle

Le 21 décembre, le Conseil des ministres a adopté un projet de loi créant deux régimes juridiques qui lui confèrent des pouvoirs exceptionnels en cas de crise sanitaire. Ils font suite à l’état d’urgence sanitaire instauré en 2020 et qui doit prendre fin en avril 2021.

Illustration - l’exception devient la règle

En mars 2020, une loi avait attribué un large éventail de pouvoirs d’exception au gouvernement. La ministre de la Justice avait alors juré qu’il n’était pas question que ces pouvoirs rentrent dans le droit commun. Deux prolongations plus tard et la fin de ces mesures exceptionnelles approchant, le gouvernement se refuse désormais à s’en défaire.

L’état d’urgence sanitaire défini dans ce projet élargirait à toute crise sanitaire les dispositions prises lors de celle du Covid. Il serait instauré par décret, sans intervention du Parlement sauf pour le prolonger au-delà d’un mois. Ce projet y ajoute un « état de crise sanitaire » dont même le renouvellement serait décidé directement en Conseil des ministres. Il interviendrait avant l’état d’urgence ou après celui-ci, au nom de la lutte contre les « effets » de la crise, sans limite de durée. Cet état de crise permet lui aussi de prendre des mesures d’isolement, de mise en quarantaine, ou encore de réquisition des personnes et des biens.

Des responsables lepénistes et des Républicains ont dénoncé la possibilité introduite dans le texte de faire dépendre les restrictions de liberté d’un test ou d’un traitement médical, un vaccin par exemple. Le gouvernement s’est tiré à bon compte de ces critiques, en rappelant que le vaccin ne serait pas obligatoire et en s’engageant à ne pas faire voter le projet de loi avant plusieurs mois. Mais l’objectif essentiel demeure, qui est de renforcer les pouvoirs à la disposition du gouvernement. Dominé par les partis qui se succèdent à la tête de l’État ou aspirent à y accéder, le Parlement n’a certes jamais constitué un véritable contre-pouvoir. Néanmoins, les discussions parlementaires, les procédures qu’elles entraînent, peuvent retarder des décisions et constituer des faux frais pour la machine gouvernementale. Or, face à la crise économique, la bourgeoisie peut avoir de plus en plus besoin que le pouvoir prenne des mesures d’urgence, aussi impopulaires qu’elles soient.

Dans une société capitaliste en crise, l’exception tend à devenir la règle.

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