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Leur société
Implants médicaux : le prix de la rentabilité
Un morceau de filet à mandarines aurait pu devenir un implant vaginal et être vendu comme tel dans tous les pays européens. Ce n’est pas une mauvaise blague, c’est la réalité : une expérience réalisée par une journaliste néerlandaise pour dénoncer l’absence de contrôle lors de la mise sur le marché des dispositifs médicaux pourtant implantés dans le cœur, les vaisseaux, les seins, sous la peau, le vagin, dans les os…
La journaliste a donc acheté un filet à mandarines et, avec un médecin, a monté le dossier technique de son implant, simplement en reprenant les dossiers d’autres implants vaginaux. Car pour obtenir une certification, il suffit au fabricant de montrer que le dispositif est similaire à ce qui existe sur le marché. Aucune preuve de son efficacité clinique, aucune preuve qu’il apporte un bénéfice pour la santé ne sont exigées.
Le dossier du fabricant doit ensuite être présenté à un organisme de certification qui délivre le certificat CE (Conformité européenne) qui confère aux produits qui l’arborent le droit d’être vendu dans les pays de l’Union. Ces organismes sont des sociétés auxquelles les États donnent la licence d’attribuer les certificats CE. Les fabricants choisissent leur organisme de contrôle et le payent.
Le dossier du filet à mandarines a été donné à trois organismes différents et a obtenu trois approbations de principe pour être fabriqué, mis sur le marché et implanté.
C’est révoltant et inquiétant mais aussi finalement dans l’ordre des choses. Car si les implants médicaux sont de remarquables produits qui sauvent des vies humaines, permettent à ceux qui autrefois auraient été condamnés à l’inactivité ou l’exclusion de continuer à vivre au cœur de la société, ils sont avant tout des marchandises qu’il faut donc vendre à tout prix. Et c’est un très gros marché.
L’émission Cash Investigation d’Élise Lucet, le 27 novembre sur France 2 en a montré quelques exemples dont la valve aortique Tavi qui peut être placée sans intervention chirurgicale, une valve conçue pour des sujets âgés qui ne peuvent pas supporter une opération. Cette valve a permis de réaliser trois milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2017. L’idée est maintenant de placer ces valves sur des sujets plus jeunes. Des médecins mettent en garde, affirmant qu’on ne sait pas quelle est la durée de vie de ces valves et qu’une sur deux est abîmée au bout de huit ans. Mais peu importe aux fabricants qui, eux, ont pour projet : cinq milliards en 2021 !
On se souvient aussi des prothèses mammaires PIP, fabriquées à base d’un gel de silicone bon marché mais interdit à l’usage médical. Certaines se sont rompues laissant le gel se répandre dans le corps avec de graves conséquences. Le patron de la société fabricante a été condamné pour escroquerie, mais aujourd’hui d’autres prothèses mammaires font courir d’autres risques. Pour certaines, on sait que leur structure est irritante, qu’elles sont à l’origine de cas de lymphomes. Mais elles sont encore vendues et implantées.
Et cela continuera… tant que l’argent présidera à l’organisation de toute la production et que les contrôlés choisiront leurs contrôleurs.