Dans le monde

Maroc : la répression contre les opposants se durcit

Maati Monjib, militant bien connu des droits démocratiques au Maroc, a été condamné à un an de prison ferme et 15 000 dirhams (1 400 euros) d’amende pour atteinte à la sécurité de l’État et escroquerie. Il est en grève de la faim depuis le 4 mars pour dénoncer cette injustice.

Ni lui ni ses avocats n’étaient présents lors de la parodie de procès, pour la bonne raison qu’ils n’avaient pas été convoqués, et que Maati Monjib était en détention préventive dans le cadre d’une autre affaire. Il a donc été condamné par contumace et ses avocats ont appris le verdict… par la plateforme électronique du ministère de la Justice.

L’affaire pour laquelle il a été condamné remonte à 2015, et visait alors six autres journalistes et militants de la liberté d’expression, qui intervenaient comme lui à travers l’AMJI (Association marocaine pour le journalisme d’investigation).

Dans la deuxième affaire, qui lui vaut d’être en prison depuis le 29 décembre 2020, il est accusé de blanchiment d’argent, ce qu’il nie tout autant que les accusations précédentes. Son cas n’est pas isolé, d’autres opposants politiques sont d’abord lynchés par les médias aux ordres du pouvoir, puis poursuivis par la justice et emprisonnés pour diverses affaires de droit commun qu’ils contestent.

Le journaliste Omar Radi est en détention préventive depuis près de huit mois, accusé de viol, attentat à la pudeur et évasion fiscale. Le rédacteur en chef d’un journal contestataire, ­Akhbar al-Youm, est lui aussi en détention préventive depuis près de dix mois, accusé de viol avec violence et séquestration. Sa nièce, journaliste, avait été condamnée à un an de prison pour avortement illégal et relations sexuelles hors mariage, avant d’être graciée face au tollé que cette affaire avait provoqué. L’ex-directeur du journal a été jugé et a écopé de quinze ans de prison pour traite d’êtres humains et viol.

La répression s’abat aussi sur bien des opposants anonymes et sur tous les participants à des mouvements de contestation. Depuis le soulèvement de Laâyoune en 2010, 19 prisonniers saharaouis croupissent en prison à des centaines de kilomètres de leurs familles. Nasser Zefzafi et ses camarades du Hirak sont encore en prison, condamnés à de lourdes peines pour avoir été les leaders d’un large mouvement réclamant plus de justice sociale, qui avait embrasé le Rif marocain en 2017. Ceux de Jerada, une ancienne ville minière, paient aussi pour le mouvement de contestation qui avait explosé en 2018, après la mort de deux mineurs. Fin janvier 2021, les gendarmes mobiles ont été immédiatement mobilisés pour intimider les ouvriers de PSA à Kenitra, qui étaient en grève pour de meilleurs salaires et conditions de travail.

Après le Printemps arabe, qui avait mobilisé la jeunesse marocaine en février 2011, le pouvoir avait accordé quelques libertés démocratiques et accouché d’une nouvelle Constitution, présentée comme progressiste et démocratique. Ce n’avait été qu’une courte parenthèse, bien limitée, dans cet État dont les gouvernements français se sont toujours montrés complices.

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