Nouveau porte-avions : pour quelques milliards de plus16/12/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/12/2733.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Nouveau porte-avions : pour quelques milliards de plus

Le 8 décembre, Macron a confirmé la construction d’un nouveau porte-avions à propulsion nucléaire. Un milliard d’euros sera débloqué pour les études préparatoires d’ici 2025. La construction commencera un peu plus tard, en vue d’une mise en service en 2035.

Les estimations les plus raisonnables parlent d’un coût total d’au moins dix milliards d’euros, et ce genre de plafond est fait pour être crevé à plusieurs reprises.

En se déplaçant pour l’occasion à l’usine Framatome, spécialisée dans la fabrication de chaudières nucléaires militaires et civiles, Macron a voulu montrer que l’État continuait à soutenir cette filière. La question des déchets n’a toujours pas de solution, pas plus que celle du démantèlement des vieilles centrales. La construction de nouvelles suivant la technique dite EPR prend des années de retard. Mais qu’importe : au vu du capital immobilisé dans le secteur, l’État remet une pièce dans la machine avec cette grandiose commande militaire. Elle comporte deux chaudières, produisant l’énergie capable d’entraîner les 75 000 tonnes du futur porte-avions à près de 50 km/heure, tout en catapultant à la minute deux avions de trente tonnes.

Cette douteuse prouesse technologique n’est en fait que très relative : la France n’arme qu’un seul porte-avions, 45 000 tonnes pour le Charles-de-Gaulle, et 75 000 demain pour son remplaçant, alors que la marine des États-Unis en arme onze, dont les derniers de 110 000 tonnes. De plus les deux catapultes dernier cri sont de fabrication américaine et facturées un milliard d’euros. Mais, à son échelle, l’État français se donne les moyens d’intervenir sur toutes les mers et à des centaines de kilomètres à l’intérieur des terres, comme il l’a fait de la Libye à l’Irak, de l’Afghanistan à la Yougoslavie, partout où des avions décollant du Charles-de-Gaulle sont allés jeter des bombes et tirer des missiles.

À la suite de tous ses prédécesseurs, Macron a affirmé que sur le nucléaire reposent « la dissuasion, les sous-marins, notre porte-avions, tout ce qui fait que la France est une puissance indépendante, écoutée, respectée ». Les porte-parole de la marine sont depuis quelque temps un peu plus précis que le président. Ils soulignent que, alors que le Charles-de-Gaulle n’avait eu à bombarder que des populations incapables de répliquer, le prochain porte-avions devait se préparer à de réelles batailles navales. D’où l’augmentation de sa taille, de sa puissance et de celle des avions embarqués. Les escarmouches et les manœuvres d’intimidation contre des navires turcs en Méditerranée donnent quelque poids aux discours des amiraux. La course aux armements navals qui s’intensifie sur la planète entière confirme leurs sinistres prédictions.

Un seul discours de Macron aura ainsi fourni un condensé de la stupidité criminelle du système social qu’il défend : les milliards d’argent public qui manquent cruellement ailleurs sont engloutis pour soutenir des industriels irresponsables ; et, en même temps, une arme de terreur est mise en chantier pour défendre la part de chair fraîche que quelques capitalistes veulent conserver sur le marché mondial.

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