Sécheresse : les agriculteurs au régime sec ?24/07/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/07/2660.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sécheresse : les agriculteurs au régime sec ?

En raison de la sécheresse prolongée, plus de 70 départements connaissent des restrictions d’eau. Les fortes températures et le manque d’eau affectant nombre d’exploitations agricoles ont décidé le gouvernement à prendre quelques mesures.

D’abord, dans 33 départements, les éleveurs ne disposant plus de fourrage pour nourrir leurs animaux sont autorisés à faucher ou à faire pâturer leurs jachères sans perdre le bénéfice de leur déclaration en SIE (surface d’intérêt écologique) et les aides subséquentes. Le ministre de l’Agriculture a également affirmé que l’équivalent d’un milliard d’euros d’aides européennes pourrait être, à sa demande, versé de façon anticipée aux ayants droit. Pour le reste, le ministre Didier Guillaume prodigue surtout des bons conseils, comme celui de la solidarité entre éleveurs de départements diversement touchés par la sécheresse.

La FNSEA, représentante des gros exploitants (175 000 sur 461 000 entreprises agricoles selon les statistiques étatiques de 2017), en particulier des gros céréaliers, réclame de son côté la gratuité des péages et des aides au transport. Les plus petits, producteurs laitiers et éleveurs en particulier, en sont réduits, en fonction de leur trésorerie, à installer des systèmes de rafraîchissement pour leurs bêtes ou à trouver des astuces pour les nourrir, après avoir sérieusement entamé leurs réserves de fourrage pour l’année. La solidarité entre petits exploitants existe déjà de longue date, bien avant que soient prodigués les conseils du ministre.

Nombre d’entre eux, dans le Sud-Ouest en particulier, regardent avec inquiétude les réserves d’eau fondre et exigent de nouveaux aménagements. Le ministère a pris position dans ce sens, mais des études géophysiques ont montré que, si ceux-ci pouvaient réduire la sécheresse agricole de 10 %, ils conduiraient parallèlement à une aggravation à hauteur de 50 % de l’intensité des sécheresses sur l’ensemble du bassin versant.

Il reste que l’indispensable fourrage, loin de constituer des réserves utilisables localement en fonction des besoins des animaux et sujettes à des variations de volume liées à la météo, est en fait, comme beaucoup d’autres produits nécessaires, devenu marchandise et objet de spéculation. Il s’achète et se vend au travers de toute l’Europe, la Suède s’étant par exemple approvisionnée en Espagne en 2018. Mais l’été dernier, précédente période de sécheresse, la paille était passée de 70 à 140 ou même 160 euros la tonne, le foin ayant lui aussi quasiment doublé.

Cette spéculation est un fait avéré, le ministre de l’Agriculture l’a même évoquée il y a quelques mois, précisant qu’il convenait… de prendre ses précautions à l’époque. Autrement dit, il fallait faire des stocks en prévision des hausses spéculatives de prix.

Que, sécheresse ou non, des spéculateurs fassent ainsi leur beurre sur les éleveurs et les consommateurs, est typique de cette société du profit hors sol.

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