Editorial spécial SNCF / Après le succès du 22 mars, préparons le 3 avril
25 000 cheminots ont défilé à Paris le 22 mars, soit un sur six. Entre 350 000 et 500 000 personnes ont manifesté le même jour dans toute la France. La journée du 22 mars a été un réel succès, pour les travailleurs de la fonction publique comme pour les cheminots.
Le nombre de cheminots en grève a battu toutes les prévisions, surprenant la direction comme les médias, qui n’ont pu que constater que ce « tour de chauffe » était plutôt un « coup de semonce » adressé au gouvernement.
Les taux de grévistes annoncés par la direction de la SNCF – 37,7 % globalement et 45,7 % à l’exécution – n’avaient pas été atteints depuis bien longtemps. Ce chiffre moyen ne donne qu'une pâle idée de la réalité. Dans certains ateliers, on a enregistré des taux de grévistes allant jusqu’à 80 ou 90 % pour les ouvriers de production.
La grève a été aussi très suivie par les agents commerciaux et bien des gares étaient fermées ou semblaient bien vides. Les conducteurs et les contrôleurs eux aussi ont été nombreux à rejoindre la grève, parfois même largement majoritaires, malgré les consignes de la CGT et de l’UNSA.
Le nombre étonnamment élevé de chefs et de cadres ayant décidé, cette fois, de faire grève et même de participer à la manifestation ; la présence importante de jeunes pour qui c'était la première grève, la première manifestation ; la fréquentation bien plus grande que d'habitude des réunions et des assemblées générales là où elles ont eu lieu... Tout cela a fait aussi de cette journée un vrai succès et un encouragement à continuer. Car ce ne peut être qu’un premier pas.
La prochaine échéance donnée par les syndicats est le mardi 3 avril. CGT, CFDT et UNSA appellent à deux jours de grève tandis que SUD-Rail a déposé un préavis pour une grève reconductible à partir de cette date.
Certains d’entre nous pensent suivre le calendrier de deux jours de grève tous les cinq jours, étalé sur trois mois. Ils espèrent que cette forme de grève « à l’économie » pourrait permettre de gagner sans que ça nous coûte trop. Mais cela n’a jamais été le cas. Sans compter qu’il s’agit cette fois de mener la lutte contre un gouvernement, contre un État, qui a décidé de faire une démonstration de force en direction de tous les travailleurs. Il faudra bien qu'à un moment ou à un autre, les cheminots mettent toutes leurs forces dans la bataille pour pouvoir l’emporter.
Quelle forme prendra la lutte, personne ne le sait encore, mais ce ne pourra être qu'une grève déterminée, avec des cheminots prêts à tenir le temps qu'il faudra pour gagner.
Au-delà des différences de vue sur la suite à donner aux journées des 3 et 4 avril, la priorité de l’heure est de développer ce mouvement naissant, de tout faire pour entraîner dans la lutte de nouveaux bataillons de cheminots. Il nous reste maintenant une dizaine de jours pour préparer le 3 avril et en faire un succès encore plus grand que le 22 mars.
Chacun d'entre nous doit mettre toute son énergie à convaincre un par un ses camarades de travail à rejoindre le mouvement. Le meilleur moyen de se donner toutes les chances pour la suite du mouvement est de réussir les journées des 3 et 4 avril.
Le 22 mars, les cheminots et les fonctionnaires ont commencé à relever la tête face à Macron. Leur combat est loin d’être un combat catégoriel. Macron a lancé une bataille contre tous les travailleurs, en commençant par ceux qui paraissent les mieux à même de se défendre. Il espère, s’il arrive à faire plier ces deux secteurs, affaiblir tous les travailleurs pour mieux faire passer les attaques suivantes. Bien des cheminots ont compris cela et sont conscients de leurs responsabilités dans cette lutte.
Les médias vont continuer à se déchainer contre ces prétendus privilégiés que seraient les cheminots et les fonctionnaires, utilisant les arguments les plus bas.
Ces derniers jours, certains ont trouvé malin de reprocher aux cheminots de se battre pour conserver le statut non pas pour eux-mêmes, mais pour leurs enfants qui seraient à leur tour embauchés presque automatiquement à la SNCF. C’est un mensonge grossier !
Mais qui n’est pas inquiet aujourd’hui pour l'avenir de ses enfants ? Comment pourront-ils à leur tour construire leur vie alors qu'ils vont de CDD en contrat d'intérim, de galère en galère ? C'est justement parce qu'ils ne veulent pas de cette vie de précarité pour leurs enfants et pour eux-mêmes que des cheminots et des fonctionnaires sont entrés dans la lutte. Et c'est pour les mêmes raisons, en comprenant que cette lutte les concerne aussi, que des travailleurs d'autres secteurs pourront les soutenir, et pourquoi pas, les rejoindre.