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Leur société
Annecy : un drame et ses récupérations politiques
Jeudi 8 juin, quelques heures après l’agression d’Annecy, le gouvernement, la droite et l’extrême droite ont tenté de se livrer à une opération de récupération, avant même d’avoir le détail des informations sur les circonstances de ce drame.
Alors qu’on ignorait les mobiles de l’agresseur et l’état de santé des victimes, la présidente de l’Assemblée nationale a demandé aux députés d’observer une minute de silence. Aurore Bergé, députée Renaissance, a saisi l’occasion pour cracher son mépris aux opposants à la réforme des retraites, taxant la discussion parlementaire de « bataille de chiffonniers, en décalage quand des enfants sont en état d’urgence absolue ». Le ministre de l’Intérieur Darmanin, lui, s’est placé sur le terrain de l’extrême droite : au JT de TF1, après avoir expliqué que l’agresseur était en situation régulière, il a insinué qu’il y aurait pourtant un lien entre son statut de demandeur d’asile et son acte monstrueux. Quant à Macron, il s’est donné le beau rôle : il s’est rendu au chevet des victimes au CHU de Grenoble et a déclaré à une soignante, main sur le cœur et face à la caméra, qu’il n’abandonnerait jamais l’hôpital public. Comme s’il ne lui refusait pas depuis des annnées les moyens humains et matériels nécessaires.
La droite et l’extrême droite n’ont pas non plus perdu de temps. À peine connue la nationalité syrienne de l’agresseur, les dirigeants LR Retailleau, Marleix et Ciotti y sont allés chacun de leur couplet contre l’immigration, de façon plus ou moins outrancière. Au RN, la députée Lavalette et Jordan Bardella ont renchéri, rejoints par Le Pen. Zemmour a carrément assimilé les demandeurs d’asile à des tueurs d’enfants, et vociféré contre un prétendu « francocide ». Enhardies par ce déchaînement de bêtise xénophobe, une quarantaine de personnes se sont rassemblées à Annecy, devant le jardin d’enfants, scandant : « Bleu-blanc-rouge : la France aux Français ! » À Saint-Brévin-les-Pins, en Loire-Atlantique, une dizaine de jeunes crétins ont perturbé le conseil municipal aux cris de « Hier Annecy, demain Saint-Brévin ! », comme s’il y avait un lien entre le centre d’accueil pour demandeurs d’asile et l’agression d’Annecy.
Qu’ils aient exploité l’émotion collective pour tenter de faire oublier la réforme des retraites ou pour appeler à la haine contre les migrants, une chose est sûre : ces politiciens bourgeois, tous autant qu’ils sont, ne se préoccupent d’un drame de ce genre et de ses victimes que s’ils peuvent l’exploiter.