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Tunisie : Essebsi ou la continuité de l’État
Le président tunisien Béji Caïd Essebsi est décédé jeudi 25 juillet à l’âge de 92 ans. C’est à un fidèle collaborateur de l’impérialisme français que Macron a voulu rendre hommage, parlant de « celui qui fut trois fois ministre de Bourguiba, Premier ministre en 2011, deux fois ambassadeur, trois fois député et président de la Chambre ».
Essebsi a commencé sa carrière comme conseiller de Bourguiba, homme qui, à la tête de l’État tunisien indépendant, permettait à l’ex-puissance coloniale française de prolonger sa domination. Sous Bourguiba, il devint ministre de l’Intérieur, se faisant la main dans la répression des manifestants et des opposants au nouveau régime. Ambassadeur en France en 1970, il devint un proche de Foccart, l’homme de main de la Françafrique, puis ministre des Affaires étrangères. Après le coup de force de Ben Ali, il adhéra au parti du dictateur et fut deux années durant président de la Chambre des députés tunisienne.
Le 12 février 2011, le dictateur Ben Ali s’enfuyait devant la révolte populaire. Rapidement, Essebsi apparut le mieux placé pour prendre le relais et accréditer une transition démocratique. En tant que chef du deuxième gouvernement provisoire, il put recycler au nom de l’unité nationale d’anciens politiciens benalistes et des membres du courant islamiste.
C’est sous prétexte d’une nécessaire réconciliation qu’une loi d’amnistie a fait réapparaître au grand jour les anciens benalistes, ceux qui avaient prospéré à l’ombre du dictateur et dont la population voulait se débarrasser en 2011.
Pour les dirigeants occidentaux, Béji Caïd Essebsi aurait été un dirigeant modèle ayant permis l’établissement de la démocratie parlementaire et évité que le pouvoir tombe aux mains des islamistes radicaux ou bien de l’état-major militaire, comme cela a été le cas en Égypte. Mais la population pauvre, elle, doit continuer à survivre au jour le jour de petits jobs, de salaires de misère ou de l’économie parallèle du côté de la frontière libyenne.
Les fréquents mouvements de grève, les sit-in, les rassemblements de jeunes chômeurs prêts à émigrer coûte que coûte, ainsi que les manifestations de colère et de révolte régulièrement réprimées, montrent que, huit ans après la révolte qui a chassé la dictature de Ben Ali, les conditions d’existence des classes pauvres ne se sont pas améliorées. En Tunisie, après celle de 2011, une autre révolution reste à faire.