Répression : défendre le système, une tâche ingrate24/04/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/04/2647.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Répression : défendre le système, une tâche ingrate

Avec 28 décès depuis le début de l’année, le nombre de suicides de policiers est en augmentation, supérieur à celui recensé dans d’autres professions. Un suicide est certes toujours un drame individuel aux causes multiples et complexes, mais une telle recrudescence est certainement l’indicateur d’une situation.

Les syndicats dénoncent « la charge de travail, les heures supplémentaires non payées, le suremploi de policiers qui ne peuvent plus prendre leur week-end de repos. » Selon un retraité de la police, « les conditions de travail se sont dégradées, beaucoup de postes ont été supprimés, il y a une course aux chiffres. La pression est très forte notamment sur les jeunes qui arrivent. Ils n’osent plus dire non. En plus, ils sont sous-payés. »

Les mêmes causes avaient déjà poussé les policiers à manifester en octobre 2016, de nuit et avec leurs véhicules de service. Ces manifestations, pourtant illégales et non déclarées, avaient reçu le soutien de Manuel Valls, alors Premier ministre. Mais rien n’a changé car malgré les hommages à bon marché, les policiers du rang ne sont pas vraiment mieux traités que le personnel des hôpitaux ou tant d’autres travailleurs qui subissent les coupes budgétaires, la course à la productivité, les suppressions d’emplois.

Cependant, les policiers ne sont pas des salariés comme les autres. Leur tâche est de maintenir l’ordre social en place avec toutes ses injustices. Ceux qui ont rejoint la police en pensant sincèrement défendre ainsi la veuve et l’orphelin sont surtout confrontés à la misère morale, à la violence et aux trafics engendrés par la pauvreté, le chômage, le délabrement de certains quartiers populaires et la disparition des organisations ouvrières. Il y a certes de quoi déprimer !

Envoyés par le ministère de l’Intérieur tous les week-ends depuis le 17 novembre pour réprimer les gilets jaunes, éborgner des manifestants, briser des crânes et des membres, des milliers de policiers découvrent qu’ils sont largement détestés par toute une fraction de la population. Bien des policiers ou gendarmes du rang qui se sont reconnus dans les revendications des gilets jaunes peuvent en ressentir un malaise.

Les policiers, et à un autre niveau les militaires, sont le bras armé d’un appareil d’État destiné à défendre les intérêts du grand capital, la propriété privée des grandes entreprises, des banques et des riches possédants. Derrière les formules sur « la loi républicaine », ils sont là pour éviter que la colère des quartiers populaire ou celle des travailleurs en lutte ne débordent dans les beaux quartiers. Pour faire ce sale travail, les classes possédantes ont toujours recruté parmi les classes populaires. Même si le gouvernement et la haute hiérarchie donnaient aux policiers autre chose que des paroles douceâtres ou des médailles, parfois à titre posthume, cela ne rendrait pas leur tâche moins injuste.

Si certains manifestants parmi les gilets jaunes ont lancé aux policiers « Suicidez-vous », d’autres leur ont dit « Ne vous suicidez pas mais rejoignez-nous. » La société doit changer pour tout le monde.

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