- Accueil
- Lutte ouvrière n°2633
- Hauts fonctionnaires : les vrais nantis et leurs serviteurs
Leur société
Hauts fonctionnaires : les vrais nantis et leurs serviteurs
L’annonce que Chantal Jouanno, présidente de la commission nationale du débat public, avait un salaire mensuel de 14 666 euros a, à juste titre, soulevé l’indignation de bien des travailleurs gagnant souvent dix fois moins qu’elle, et encore. Elle a donc décidé de ne pas veiller à l’organisation du grand débat, dont un des sujets sensibles est le pouvoir d’achat des classes populaires.
Mais Chantal Jouanno n’est pas la seule. L’État compte entre 15 000 et 20 000 hauts fonctionnaires particulièrement bien payés. À l’époque de Hollande, 656 de ces très hauts fonctionnaires, tout en haut du tableau, gagnaient plus que le président et le Premier ministre, soit plus de 15 000 euros brut par mois. Évidemment, cela a de quoi choquer. Chaque travailleur sent bien que ces individus ne partagent ni la vie ni les préoccupations des classes populaires et que les décisions qu’ils prennent ou qu’ils appliquent n’ont rien à voir avec les intérêts de la population.
Tous sont en général formés dans les grandes écoles, particulièrement l’École nationale d’administration (ENA). Ils y apprennent non pas à servir l’État, formule abstraite qui ne veut rien dire, mais à servir les intérêts de la grande bourgeoisie. Ils viennent souvent du même monde mais, même quand ce n’est pas le cas, ils partagent les valeurs de cette bourgeoise, la conviction qu’il faut que la population travaille et paye pour que les profits s’entassent dans les caisses des grands capitalistes. Non seulement ces hauts fonctionnaires sont sélectionnés et formés à défendre cette classe sociale et son système économique basé sur l’exploitation, mais ils ne sont ni élus ni contrôlés par la population, et pour cause !
Pour servir les possédants, ils sont très bien rémunérés, car ils doivent être intéressés à la survie du système, se sentir comme faisant partie des hautes couches de la société. Mais croire que là résident les causes des injustices de la société et des problèmes sociaux, c’est se laisser éblouir par un miroir aux alouettes. Si leurs salaires sont indécents, les revenus de ceux qu’ils servent le sont encore plus.
Rien qu’un Carlos Ghosn, patron de Renault-Nissan, avec ses 13 millions annuels, gagne cent fois plus que le mieux payé des hauts fonctionnaires. Mais lui aussi sert encore à cacher où se trouvent les vraies richesses. Les fortunes des capitalistes qu’ils servent se comptent en milliards. Celle d’un Bernard Arnault s’élève aujourd’hui à 73 milliards d’euros. En 2018, elle a été accrue de 19 milliards supplémentaires. Cela revient à dire que Bernard Arnault a gagné l’équivalent de 1,5 milliard d’euros par mois, soit 10 000 fois plus que ces hauts fonctionnaires grassement rémunérés. Non seulement ces capitalistes s’accaparent toutes les richesses produites par les travailleurs, mais ils dirigent et organisent toute l’économie en fonction de leurs intérêts.
Pour qu’une toute petite minorité puisse vivre dans l’opulence et considérer le monde comme un vaste Monopoly dans lequel placer ses capitaux, l’immense majorité de la population s’enfonce dans les difficultés et peine à vivre dignement.
C’est pour défendre ce système que des hauts fonctionnaires sont généreusement rémunérés, mais ils n’en sont que les serviteurs. Pour mettre fin à l’injustice, il faudra s’attaquer aux maîtres !