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Suède : l’extrême droite capitalise les mécontentements
Avec environ 85 % de participation, les électeurs ont voté le 9 septembre en Suède, à la fois pour le Parlement et les conseils régionaux et municipaux. Le parti d’extrême droite Démocrates de Suède, Sverigedemokraterna (SD), progresse de près de 5 % par rapport à 2014, obtenant 17,6 % des suffrages et 62 députés sur 349 au Riksdag, le Parlement de Stockholm.
Les deux grands partis qui assurent l’alternance au gouvernement depuis des décennies, les sociaux-démocrates et les conservateurs, perdent chacun entre 3 et 4 % des suffrages. La coalition des sociaux-démocrates et Verts, dirigée par l’actuel Premier ministre Stefan Löfven, arrive pourtant de peu en tête. L’ex-Parti communiste (Parti de Gauche) progresserait de 2 %, atteignant près de 8 %. Cependant la formation d’un nouveau gouvernement risque d’être problématique, le bloc de gauche totalisant 144 députés, avec ceux de l’ex-PC, et l’Alliance de droite 143. Les leaders des deux blocs déclarent exclure toute alliance avec l’extrême droite, mais celle-ci multiplie les appels du pied à Kristersson, dirigeant du principal parti de droite, tout en appelant à la démission du Premier ministre.
Même si la progression de SD est moindre qu’annoncée dans les sondages, la formation d’extrême droite, aux origines néo-nazies et connue pour son slogan « Garder la Suède suédoise », peut sans doute déjà se satisfaire d’avoir en partie infléchi la campagne électorale, en jouant sur le thème de la lutte contre l’immigration et les demandeurs d’asile. À l’instar du Rassemblement national de France et de la Ligue d’Italie, dont les dirigeants l’ont bien sûr félicité, le dirigeant de SD, Åkesson, a fait campagne en mêlant immigration et insécurité, mais aussi en réclamant une hausse du pouvoir d’achat des retraités et des investissements publics dans la santé.
Et sur ce plan, les travailleurs suédois, en activité ou retraités, originaires du pays ou issus de l’immigration comme le sont 18 % des 10 millions d’habitants, ont bien des raisons de s’inquiéter. Comme l’attestent dans leur langage les statisticiens, la progression des inégalités s’accélère, en particulier depuis les réformes sociales lancées par le gouvernement de droite en 2006, précisément celles qui ont inspiré Hollande et Macron. Depuis, comme ailleurs, les riches le sont devenus de plus en plus, ne serait-ce que par la baisse de la fiscalité sur les entreprises et le capital, pendant que les services publics indispensables, comme l’accès à la santé et à l’éducation, étaient rognés. Dans le petit pays qui véhicula l’image de « l’État-providence », la pauvreté gagne du terrain, affichant un taux supérieur à la France et aux autres pays scandinaves.
Dans ce contexte, le gouvernement social-démocrate a cru bon de céder aux discours de l’extrême droite en restreignant, en novembre 2015, sa politique migratoire. L’accueil des migrants et des réfugiés est depuis lors bien limité, passé de 163 000 en 2015 à 25 000 en 2017. Preuve s’il en est que le fatras populiste qui tient lieu de programme à l’extrême droite fait toujours des adeptes, sur un terrain bien préparé par la politique des gouvernements.