Quand on se bat, on n'est pas sûr de gagner, si on ne se bat pas, on est sûr de perdre06/02/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/02/une2323.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Quand on se bat, on n'est pas sûr de gagner, si on ne se bat pas, on est sûr de perdre

Depuis le 16 janvier, des travailleurs de l'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois sont en grève reconductible pour sauver leur emploi. Depuis trois semaines, les travailleurs de Renault multiplient les débrayages pour dire non à l'accord de compétitivité que la direction veut imposer. Alors que Goodyear a annoncé sa décision de fermer l'usine d'Amiens, les 1 200 travailleurs visés se préparent à résister. Comme c'est déjà le cas à Virgin, à Sanofi ou à Candia.

Tous font face à des patrons de combat qui ne reculent devant aucun mensonge ni intimidation. La direction de PSA accuse les grévistes d'Aulnay d'être des « casseurs ». Celle de Goodyear accuse la CGT d'être « jusqu'au-boutiste » et responsable de la fermeture. Celle de Renault menace de fermer deux usines si les syndicats ne signent pas l'accord de compétitivité.

Des chantages, des accusations grossières que des journalistes répètent tels des perroquets, parce qu'ils ont vu des travailleurs laisser exploser leur colère ou parce qu'ils ont vu une caisse de boulons renversée ! Oh, on ne verra pas le PDG de PSA ou celui de Renault donner un coup de pied dans une porte. Pour ces gens-là, de toute façon, les portes s'ouvrent toutes seules. On ne les verra pas non plus proférer des propos menaçants : ils laissent ça aux vigiles et aux cadres qu'ils envoient intimider et provoquer.

Mais les décisions de ces dirigeants causent des dégâts incalculables pour toute la société. En supprimant des emplois, ils font basculer dans l'angoisse des milliers de femmes et d'hommes. Combien de familles condamnent-ils à la misère ? Combien de sous-traitants et de petites entreprises forcent-ils à mettre la clé sous la porte ?

On ne compte plus les entreprises fermées, les sites et les installations industrielles laissés à l'abandon. Ce sont parfois des usines modernes, qui pourraient fabriquer pour de longues années encore des biens utiles. Tout cela est cassé, démantelé, abandonné, au nom de la rentabilité et des profits.

Ces patrons de grandes entreprises sont des casseurs, qui démolissent des outils de production créés par des générations de travailleurs. Ils prétendent ne pas avoir le choix, mais ils sont loin d'être acculés : 9 milliards de profits pour Sanofi en 2011 ! 786 millions pour Renault sur les six premiers mois de 2012 ! Peugeot, qui aligne de mauvais chiffres, a arrosé de milliards les actionnaires ces dernières années. Quant à Goodyear, il va certainement battre en 2012 ses résultats de 2011, mais cela n'a pas empêché un de ses dirigeants de déclarer qu'« il faut accepter de se couper un bras pour ne pas mourir » ! Sauf qu'il ne s'agit jamais de leurs bras à eux !

Montebourg a osé affirmer que les demandes de Renault étaient « modérées » et qu'il fallait que les syndicats signent. Comme si perdre jusqu'à 21 jours de congés et faire 1 h 30 de route, matin et soir, pour travailler n'était pas un recul grave ! Comme si perdre 100, 200, 300 euros sur des petits salaires n'était pas une catastrophe !

Il a aussi invité les travailleurs de Goodyear à « mettre de l'eau dans leur vin ». Comme si, en 2007, ils auraient dû se plier aux diktats de Goodyear et accepter de passer à des horaires d'équipe infernaux, à la semaine de 48 heures sans augmentation de salaire, et... 400 suppressions d'emplois !

« Accepter des sacrifices pour sauver les emplois », voilà la nouvelle chanson patronale, reprise par Montebourg et par certains dirigeants confédéraux. Mais on l'a vu avec Continental : les travailleurs de l'usine de Clairoix, qui avaient accepté des reculs sans précédent, ont tous été licenciés. Aujourd'hui, Continental est l'une des firmes les plus profitables d'Allemagne, mais la grande majorité des travailleurs licenciés sont sur le carreau.

Les sacrifices que le patronat veut imposer aux travailleurs ne serviront pas à sauver les emplois, mais à grossir les profits. Le gouvernement et tous ceux qui prêchent l'acceptation aux travailleurs sont des faux amis, qui « soutiennent » les travailleurs comme la corde soutient le pendu !

Les travailleurs qui se battent n'attendent rien de personne, ils ont décidé de se défendre par eux-mêmes. Et, en se battant pour leur emploi et leur salaire, ils se battent pour une cause qui concerne tous les travailleurs : ceux qui sont menacés aujourd'hui et ceux qui le seront demain.

Les travailleurs représentent, collectivement, une force considérable qui fait tourner toute l'économie et qui peut et doit imposer ses intérêts. Se battre ensemble contre les licenciements, contre les accords de surexploitation, doit être un objectif commun.

Éditorial des bulletins d'entreprises du 4 février

Partager