L'accord Medef-CFDT-CGC-CFTC : Attaque en règle contre les travailleurs06/02/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/02/une2323.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

L'accord Medef-CFDT-CGC-CFTC : Attaque en règle contre les travailleurs

L'accord signé entre les organisations patronales et les confédérations CFDT, CGC et CFTC le 11 janvier, rédigé sous forme de projet de loi, sera présenté au Conseil des ministres le 6 mars. Le ministre du Travail Michel Sapin ne doute pas que les parlementaires approuveront, ainsi que le souhaite la direction du PS, « une transcription fidèle de cet accord dans la loi ».

En attendant, alors que les confédérations non signataires, CGT et FO, entament une campagne d'explication et préparent une manifestation contre cet accord scélérat, ministres, journalistes, représentants patronaux et responsables CFDT assurent le service après-vente et brodent à l'infini sur les « avancées » que les travailleurs en retireraient.

C'est un tissu de mensonges. Cet accord contient la précarité, le temps partiel, la flexibilité et les bas salaires à perpétuité ; il implique la fin du contrat de travail fixant horaires, salaire et lieu de travail ; il comprend la possibilité pour les patrons de fermer une usine comme on ferme sa sacoche et supprime la plus grande partie des recours légaux ; il garantit d'avance le bon droit des patrons devant les tribunaux.

Licencier plus vite, plus facilement et pour moins cher

Ainsi, en cas de « graves difficultés conjoncturelles » et sous réserve d'accord d'entreprise, le patron pourra à son gré, et pendant une période de deux ans, faire varier horaires et salaires. Il lui suffira de trouver pour cela quelques signatures syndicales. Si un accord est signé les salariés qui refuseraient ces variations d'horaires et de salaires en fonction des fluctuations des marchés de leurs patrons seraient licenciés pour « motif économique ». L'entreprise en revanche serait dans ce cas dispensée « des obligations légales et conventionnelles qui auraient résulté d'un licenciement collectif pour motif économique ».

La procédure de licenciement collectif pour motif économique serait simplifiée et sa contestation limitée dans le temps.

Par l'article 24, « sécurité juridique des relations de travail », les patrons bénéficient de lois d'exception. En effet les irrégularités de forme constatées dans un plan de licenciements n'entraveraient pas le fond, c'est-à-dire les licenciements. L'accord établit des maximums pour les indemnités forfaitaires : 14 mois de salaire maximum pour un licenciement économique après vingt-cinq ans de travail. Pour solde de tout compte et sans possibilité de recours. Et pour bien bétonner le tout, les plaintes contre ces plans ne devraient pas être formulées au-delà de 24 mois après la fin du contrat de travail. De plus, les différends sur les salaires, les conditions de travail, etc., ne pourraient pas être portés en justice au-delà de 36 mois. Tant pis, par exemple, pour les travailleurs dont la maladie professionnelle n'apparaît pas immédiatement, comme dans le cas de l'exposition à l'amiante.

Tous les travailleurs, anciens embauchés comme nouveaux, seraient soumis à la « mobilité interne ». C'est exactement contre ce type d'accord que les travailleurs de Renault se battent aujourd'hui : sous réserve d'un accord d'entreprise, les salariés pourraient être déplacés d'un site à l'autre. Un salarié qui refuserait ce déplacement serait licencié pour « motif personnel ». Mais que le futur chômeur se console, le patronat lui accorde « un bilan de compétence ou un abondement du compte personnel de formation ». Et il s'est trouvé des syndicalistes pour mettre leur nom au bas de ce papier !

L'avenir des travailleurs selon ce projet se lit dans l'extension du recours à « l'activité partielle », avec des salaires toujours diminués et payés, qui plus est, de plus en plus par les fonds publics. L'étape suivante, contenue dans l'accord, est l'expérimentation du « contrat de travail intermittent » : on travaille quand ça arrange l'entreprise, aux horaires et au poste qui conviennent au patron, et le salaire est lissé sur l'année. L'accord ne dit toutefois pas comment vivre sous ce régime.

Les prétendues avancées favorables aux travailleurs

Ces régressions considérables du droit du travail, dont les syndicalistes signataires et les ministres ne parlent pas, seraient compensées par de prétendues « avancées ». Mais lesquelles ?

Le secrétaire général de la CFDT se réjouit d'avance à l'idée que des millions de travailleurs vont enfin « pouvoir accéder à une mutuelle ». Grand bien lui fasse, mais l'accord ne contient que la promesse de négociations futures sur le sujet et précise que les travailleurs devront, de toute façon, payer la moitié de la cotisation. C'est-à-dire plus que ce qu'ils payent actuellement dans les accords de ce type.

Le droit de conserver sa mutuelle en cas de licenciement est lui aussi soumis à une future discussion. Ce qui n'empêche pas les commentateurs favorables à l'accord de le présenter comme un acquis. Il en va de même pour les « droits rechargeables » à l'assurance chômage, lesquels, avant même d'être définis, ne devront en aucun cas « aggraver le déséquilibre financier du régime d'assurance chômage », c'est-à-dire ne rien coûter au patronat.

Les dirigeants de la CFDT insistent tout particulièrement sur les augmentations de cotisations patronales sur les contrats courts qu'ils auraient arrachées de hautes lutte. Ces augmentations seraient fort modestes et la plupart des branches employant des contrats courts en seraient exonérées, y compris l'intérim. Et elles seraient compensées par un dégrèvement total de cotisations pour les patrons embauchant des jeunes en CDI. Le bilan de l'opération serait donc totalement favorable au patronat.

Le droit à la formation tout au long de la vie, tarte à la crème de certains syndicalistes, est une galéjade. Ce « droit » est vide, puisqu'il est soumis à l'accord patronal, et encore, lorsque qu'on a un patron, donc un travail.

Quant aux contrats de travail à temps partiel, leur durée minimum hebdomadaire serait portée à 24 heures au lieu de 20 heures. Le texte explique que l'amplitude des horaires devrait permettre au salarié de cumuler plus facilement plusieurs emplois. Quelle avancée !

Les syndicalistes signataires et avec eux le gouvernement Hollande voudraient ainsi liquider le droit du travail, résultat de dizaines d'années de luttes de la classe ouvrière. Mais ce n'est pas parce que des syndicalistes dits d'accompagnement cautionnent une telle capitulation en rase campagne, laissant le champ entièrement libre au patronat, que les travailleurs doivent se laisser faire.

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