Nathalie Arthaud, lundi 24 mai : Seule la classe ouvrière peut changer le monde26/05/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/05/une2182.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Divers

Nathalie Arthaud, lundi 24 mai : Seule la classe ouvrière peut changer le monde

En cette troisième journée de fête, (...) nous tenons à réaffirmer qu'être communiste, c'est être internationaliste. Notre internationalisme n'est pas fondé sur de simples sentiments de solidarité, mais sur le constat que, l'économie mondiale formant un tout, l'humanité ne pourra se débarrasser de l'organisation capitaliste de l'économie qu'à l'échelle du monde. (...)

Les progrès dans les techniques de la communication, de l'informatique, sont formidables. Ils permettront des miracles pour l'humanité de demain, débarrassée de l'exploitation. Mais, pour le moment, ils permettent surtout de transmettre instantanément les ordres d'achat et de vente d'actions en Bourse.

On disait naguère de l'empire de Charles Quint que le soleil ne s'y couchait jamais. Eh bien, aujourd'hui, on peut dire que la spéculation ne s'arrête jamais car, de Tokyo à la côte ouest de l'Amérique, il y a toujours quelque part une Bourse ouverte.

La crise économique a déjà provoqué des dégâts un peu partout sur la planète. Faut-il rappeler qu'une de ses premières phases a été la crise alimentaire ? La spéculation qui s'est jetée massivement, en un moment donné, sur les produits alimentaires de base, le blé, le riz, en en faisant grimper les prix, a ainsi condamné à la famine des centaines de millions d'enfants, de femmes et d'hommes qui, déjà en temps ordinaire, ne mangent pas à leur faim !

LES TRAVAILLEURS N'ONT RIEN A GAGNER A UN ECLATEMENT DE L'EURO

Dans un tout autre domaine, la crise est en train de faire de nouvelles victimes : l'Union européenne et l'euro. (...)

Contrairement aux stupidités véhiculées par des nationalistes de tout acabit, l'unification des différents pays d'Europe est une nécessité. Mais ce qui se passe en ce moment illustre à quel point la bourgeoisie est une classe trop réactionnaire pour être capable de réaliser une véritable unité de l'Europe. Elle n'a su créer que le Marché commun.

Même une monnaie unique, condition indispensable pour un marché un tant soit peu unifié, n'a été réalisée que dans une zone restreinte, dont ne fait même pas partie une des principales puissances économiques de la région, le Royaume-Uni. (...)

Derrière l'euro, il n'y a pas un État unifié, avec une politique économique et fiscale unique. Il n'a pas été difficile pour les spéculateurs de jouer les États les uns contre les autres, ou plus exactement de parier sur les uns et contre les autres. (...)

Les travailleurs n'ont rien à gagner à un éclatement de l'euro. Ce serait un recul. Un choix fait par les différentes bourgeoisies d'Europe, en particulier les plus puissantes, de se réfugier derrière leurs frontières, leur monnaie, leur richesse. Ce serait le retour du protectionnisme et un facteur d'aggravation de la crise. (...)

Les bourgeoisies allemande et française sont intervenues non pas pour « sauver la Grèce » mais pour sauver les intérêts de leurs banquiers. Elles ne laissent aux dirigeants de l'État grec que la liberté d'obéir aux mesures qu'elles leur imposent. Et les dirigeants grecs, tout socialistes qu'ils soient, sont des victimes d'autant plus consentantes des diktats de Berlin et de Paris que les mesures d'austérité imposées aux classes populaires en Grèce correspondent également aux intérêts de la bourgeoisie grecque.

Partout en Europe, la seule solution proposée pour rétablir ce que les dirigeants appellent la « confiance des marchés financiers » a été de s'engager dans des mesures d'austérité frappant la majorité de la population. (...)

LES REACTIONS DE COLERE VIENDRONT INEVITABLEMENT

Pour désamorcer les réactions des travailleurs contre les mesures d'austérité, pour les empêcher de devenir explosives, la bourgeoisie comptera sur les illusions propagées par les grands partis. La bourgeoisie comptera aussi sur les appareils syndicaux, sur leur capacité à canaliser les luttes pour les réduire à de simples manifestations de force, destinées à favoriser les négociations entre gouvernement et directions syndicales. Mais, parallèlement à cela, la bourgeoisie recourra, et recourt déjà, à de vieilles ficelles pour affaiblir le monde du travail en essayant de dresser les unes contre les autres ses différentes composantes.

(...) Une des façons les plus abjectes de dresser une catégorie de travailleurs contre une autre est de le faire en fonction de la nationalité ou des origines. C'est le jeu traditionnel de l'extrême droite, mais qui s'appuie sur des préjugés largement propagés par d'autres forces politiques de la bourgeoisie, y compris à gauche. Tout cela affaiblit le monde du travail et le rend moins conscient de ses intérêts de classe.

Voilà pourquoi être du côté des travailleurs immigrés est pour nous plus qu'une question de solidarité. Par-delà les origines et la nationalité, la classe ouvrière constitue une seule et même classe sociale, qui ne peut changer le rapport de forces en sa faveur dans la société, dans l'économie capitaliste, qu'à condition de mettre en avant ses intérêts de classe. C'est forts de cette conviction que nous revendiquons aussi la régularisation de tous les sans-papiers.

Les politiques d'austérité, en s'aggravant, toucheront inévitablement différentes catégories de la petite bourgeoisie. (...) Sauront-elles se battre contre les véritables responsables de leur malheur : la grande bourgeoisie et l'économie capitaliste ? C'est la question décisive pour l'avenir. Parce que, si la bourgeoisie se sent menacée, elle cherchera à dresser les unes contre les autres les diverses catégories populaires victimes de son économie. (...)

Dans les pays de l'Est de l'Europe, les choses vont déjà plus loin, avec la montée de l'extrême droite, sa propagande haineuse contre les nations voisines ou les minorités nationales, à commencer par les Roms.

L'histoire chaotique de cette région, les affrontements du passé entre populations souvent entremêlées et, plus encore, les interventions des grandes puissances impérialistes dans la vie de ces nations ont laissé une multitude de contentieux et de territoires disputés. Il est facile pour l'extrême droite de sortir des poubelles de l'histoire des revendications territoriales susceptibles de monter les populations les unes contre les autres.

(...) Rappelons-nous avec quelle rapidité la démagogie nationaliste des dirigeants a conduit, dans cet ex-pays européen qu'était la Yougoslavie, à des affrontements entre peuples aussi sanglants que stériles. Alors, il est vital pour l'avenir de prendre le contre-pied de toute propagande destinée à opposer les peuples les uns aux autres. Et cela commence par tous les préjugés qui prétendent rendre un autre peuple responsable des malheurs causés par la bourgeoisie, par la crise de son économie. (...)

DES CLASSES POSSEDANTES PRETES A TOUT POUR GARDER LEURS PRIVILEGES...

Lorsque la bourgeoisie est aux abois devant les dégâts de sa propre économie en crise, lorsqu'une fois son peuple brisé elle se sent en capacité d'élargir son marché par la conquête militaire, elle n'hésite pas devant les pires politiques, même celles qui conduisent à la barbarie.

Il existe un peu partout dans le monde des foyers de tension. L'oppression du peuple palestinien par l'État d'Israël soutenu et armé par l'Occident contribue, depuis soixante ans, à faire de tout le Moyen-Orient une poudrière. (...)

Combien de guerres dites ethniques en Afrique, derrière lesquelles il y a les rivalités entre entreprises capitalistes d'Europe ou d'Amérique pour piller les richesses minières ? (...)

L'Afrique continue à être vidée de son sang comme au temps des colonies. C'est cette réalité que défendent les troupes françaises en Côte d'Ivoire, au Tchad, à Djibouti ou ailleurs. La revendication de retrait des troupes françaises du continent africain est une revendication de solidarité élémentaire. Mais seule la destruction de l'impérialisme peut sauver l'Afrique d'un développement permanent de son sous-développement. Il va de soi, aussi, que les troupes françaises n'ont rien à faire en Afghanistan.

Beaucoup de ces zones de tension, beaucoup de ces conflits pourraient devenir le point de départ d'une guerre généralisée. « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage », disait en son temps Jaurès. Cela reste toujours vrai, surtout en période de crise. (...)

... MAIS LA REVOLUTION PEUT LES RENVERSER

Le prolétariat est aujourd'hui invisible sur la scène politique. Ne s'agitent sur cette scène que des pantins dont la bourgeoisie et le grand capital tirent les ficelles. Mais les révolutions s'annoncent rarement à l'avance.

Ce sont les révolutions qui ont permis à la société de se débarrasser des tyrans ou des classes privilégiées qui se croyaient éternels. Ce sont elles qui ont permis à l'humanité de progresser.

Et, pour sombres qu'aient été les dix années qui ont suivi le début de la crise de 1929, et plus sombres encore les six années suivantes, avec les horreurs de la Deuxième Guerre mondiale, il faut se rappeler aussi qu'elle a entraîné des mobilisations ouvrières d'une ampleur exceptionnelle dans un grand nombre de pays. Et si, finalement, la bourgeoisie a pu reprendre la main, la responsabilité n'en revient pas aux masses elles-mêmes, mais à leurs directions incapables ou traîtres.

Alors oui, j'ai la conviction que les masses exploitées attaquées par une bourgeoisie avide, soumises à la pression de plus en plus insupportable du grand patronat et de son État, réagiront. Tout dépendra alors de la capacité du prolétariat de faire surgir des partis communistes révolutionnaires à la hauteur des tâches, capables de contribuer à ce que la crise sociale se transforme en révolution consciente visant la transformation de la société.

Nous ne savons pas dans quelles circonstances ces partis surgiront et quels seront les premiers pays où ils deviendront assez influents pour peser sur la vie politique. Mais nous savons que cela est nécessaire. Même de petites organisations qui se fixent cela comme objectif représentent un espoir et un gage pour l'avenir. C'est pourquoi je souhaite bon courage aux organisations qui se revendiquent du communisme révolutionnaire, quel que soit le pays où elles militent ! Et ce que je leur souhaite, comme pour nous-mêmes, c'est de résister à la pression du cours réactionnaire des choses, de ne pas se décourager, de ne pas mettre leurs idées communistes révolutionnaires de côté en attendant des jours meilleurs. (...)

Je leur dis aussi de ne pas chercher des raccourcis, c'est-à-dire de ne pas chercher d'autres moyens pour changer l'ordre social actuel que la force collective de la classe ouvrière. Chercher des raccourcis se traduit inévitablement par l'abandon de la propagation des idées communistes révolutionnaires au sein de la seule classe sociale capable de faire de ces idéaux une réalité : la classe ouvrière.

Marx disait en son temps que les idées deviennent une force lorsque les masses s'en emparent. Pour que de larges masses puissent s'emparer des idées communistes, il faut des circonstances particulières qui mettent en mouvement des centaines de milliers, des millions d'hommes, et qui les poussent à défendre leurs intérêts de classe, à s'intéresser à l'avenir de la société, à se sentir concernés, à vouloir en être, à cesser d'être les spectateurs de la vie politique pour en devenir les acteurs. Ce sont ces périodes-là qu'on appelle des périodes révolutionnaires.

LES REVOLUTIONNAIRES DOIVENT AGIR AU COEUR DU MONDE DU TRAVAIL

Pour que les masses exploitées puissent s'emparer des idées communistes révolutionnaires, il faut qu'il y ait dans leurs rangs des militants, des femmes, des hommes par lesquels ces idées puissent passer.

Voilà pourquoi il est vital que cette minorité de communistes révolutionnaires existe au sein de la classe ouvrière, dans les entreprises, dans les quartiers populaires. Il faut que ces militants soient regroupés dans un parti dont l'activité ne consiste pas seulement à répéter son espoir dans le changement social futur, dans un avenir communiste.

(...) Il faut qu'ils participent aux luttes des travailleurs avec la volonté de renforcer l'efficacité de chaque lutte, mais aussi avec la volonté d'agir pour que chaque grève, chaque réaction de travailleurs (...) se traduise par un progrès de leur conscience politique.

La transformation sociale ne résultera pas de quelques lois, de quelques décrets décidés d'en haut, mais de l'activité révolutionnaire des masses elles-mêmes, c'est-à-dire de millions de femmes et d'hommes décidés à prendre en main la destinée collective de leur classe et de toute la société.

Eh bien, camarades, aussi importante que soit la différence entre la graine et l'arbre adulte, chaque graine porte les potentialités de l'arbre futur. Voilà pourquoi les organisations qui se revendiquent du communisme révolutionnaire représentent une part de l'espoir de l'avenir de l'humanité ! Mais il faut que la graine trouve un terreau nourrissant dans la classe sociale qui peut donner aux idées communistes révolutionnaires la force nécessaire pour changer le monde.

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