Le patronat veut faire payer sa crise aux ouvriers05/11/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/11/une2101.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Le patronat veut faire payer sa crise aux ouvriers

Après des années pendant lesquelles les constructeurs automobiles ont accumulé des dizaines de milliards de profits, ceux-ci annoncent maintenant la crise. Mais si les ouvriers n'ont jamais vu la couleur des profits faits sur leur dos, en revanche ils commencent déjà à payer - très cher - la récession qui s'annonce.

La baisse du pouvoir d'achat et les difficultés croissantes à trouver un crédit, y compris pour les particuliers, ont eu des effets sur les ventes dans l'automobile : tous les constructeurs (à l'exception notable des fabricants de voitures de luxe) annoncent en rafale, depuis septembre, des baisses de ventes. Spectaculaires aux États-Unis depuis un an, ces baisses atteignent à présent l'Europe : moins 7 % en octobre en France, et moins 40 % en Espagne ! Les constructeurs ont donc décidé, anticipant même sur la baisse, de lancer des plans drastiques de réduction de la production.

« Effet domino »

On a vu se succéder, depuis un mois, les annonces de mise en chômage technique de quasiment toutes les usines automobiles du pays : huit jours d'arrêt, quinze jours, un mois comme à l'usine PSA de Rennes... Ce que certains journalistes présentent bien légèrement comme des « vacances » pour les salariés est en fait une mesure qui va, bien souvent, se traduire par une forte diminution des salaires. Et quand ce n'est pas le cas, les jours chômés sont pris sur les congés, les RTT, voire les jours de formation !

Et puis les premières victimes de ces plans de réduction de production ont bien sûr été les intérimaires et les travailleurs en CDD, qui ont été mis dehors dès les premiers signes annonciateurs de la crise.

Mais les usines des constructeurs Renault, PSA ou Ford ne sont pas les seules touchées. En France, l'industrie automobile représente 2,5 millions d'emplois, si l'on compte les emplois induits. La baisse de la production dans l'automobile affecte directement des dizaines de secteurs de l'industrie - sidérurgie, métallurgie, plasturgie, etc. Il n'a pas fallu attendre longtemps pour qu'un trust comme ArcelorMittal, par exemple, réagisse en annonçant le 30 octobre la mise en sommeil de plusieurs hauts fourneaux en France.

Pour chaque jour de fermeture d'un site de production de Renault ou PSA, ce sont des dizaines de sous-traitants ou de fournisseurs qui sont touchés : Continental, Michelin, Bosch, Visteon, Hutchinson, Valeo, les Fonderies du Poitou et bien d'autres annoncent à leur tour des jours de chômage, des licenciements, des restructurations, voire, comme le plasturgiste Ranger France qui emploie 440 salariés dans le Loir-et-Cher, une situation de cessation de paiement.

Aux patrons de payer !

Que les constructeurs automobiles réduisent leur production parce qu'ils estiment ne plus vendre assez ou que dans l'avenir le marché se réduira, c'est leur problème. Mais les travailleurs n'ont aucune raison de payer les pots cassés. Lorsque les ventes se portaient bien, on leur a fait suer sang et eau pour assurer une production en hausse constante. Maintenant qu'elles sont ou risquent d'être en berne, on exige d'eux qu'ils restent à la maison et acceptent de se serrer la ceinture en attendant des jours meilleurs.

Comme si les capitalistes du secteur n'avaient pas les moyens de payer - c'est-à-dire d'assurer 100 % de la paye de leurs ouvriers, que l'usine tourne ou non, sans prendre sur les congés ou les jours de RTT !

Renault et PSA, qui pleurent misère, prétextent une baisse des ventes qui est peut-être bien réelle, mais oublient soigneusement de rappeler que durant ces dernières années ils ont accumulé des bénéfices fabuleux. Pour ne prendre que l'exemple de Renault, l'entreprise n'a connu durant ces vingt dernières années que deux années de déficit (1996 et 2003). Les dix-huit autres années, ont été des années de profits records ! Entre 1997 et 2007, elle a accumulé quelque 16 milliards d'euros de profits - et PSA, dans la même période, 10,7 milliards.

Tôt ou tard, les ouvriers de ces secteurs viendront demander à leurs patrons ce qu'ils ont fait de ces sommes folles, et exiger d'eux qu'ils payent à 100 % une crise dont ils sont, à 100 %, responsables.

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