Autriche : Gauche et droite unies ont préparé le renforcement de l'extrême droite01/10/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/10/une2096.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Autriche : Gauche et droite unies ont préparé le renforcement de l'extrême droite

Le résultat des élections législatives anticipées autrichiennes, qui ont eu lieu le 28 septembre, est sans appel. Les deux partis qui gouvernent ensemble depuis deux ans accusent un net recul : moins 5,6 % des voix pour les sociaux-démocrates du SPÖ, moins 8,7 % pour les chrétiens-conservateurs de l'ÖVP.

Pour ces deux partis qui, jusque dans les années 1980, étaient habitués à totaliser à eux seuls 80 % des voix, c'est une véritable claque. Mais le coup de massue est venu des résultats de l'extrême droite. Alors qu'en 2006 celle-ci totalisait environ 15 % des suffrages, elle fait aujourd'hui, bien que divisée en plusieurs partis rivaux (dont le FPÖ de Heinz-Christian Strache et le BZÖ de Jörg Haider) jeu égal avec le SPÖ (29,7 %), et réalise son meilleur score depuis la guerre. Elle progresse même au-delà des 26,9 % obtenus par Haider en 1999, résultat qui lui avait permis de participer à un gouvernement de coalition avec les conservateurs.

Au terme des élections de 2006 et après de nombreuses séries de tractations, un gouvernement de grande coalition SPÖ-ÖVP, emmené par un chancelier social-démocrate, Alfred Gusenbauer, s'était formé. Au-delà de querelles permanentes entre les deux partis, qui faisaient les choux gras de la presse, le gouvernement a mené des attaques systématiques contre les couches populaires : augmentation des dépenses militaires, très fortes hausses des frais universitaires, attaques contre le système de santé, contre les retraites. De nouvelles réglementations sur le temps de travail, qui permettent aux patrons d´imposer des semaines travaillées de 60 heures, des journées de 12 heures ou le travail du dimanche, ont par ailleurs été défendues par les sociaux-démocrates, sous prétexte qu'il fallait « tenir compte » du poids de la droite.

La popularité du chancelier Gusenbauer n´a pas tardé à s´effondrer. Et, pour tenter de redresser la situation, les caciques sociaux-démocrates n'ont rien trouvé de mieux que de se rallier aux thèses antieuropéennes chères à l'extrême droite.

Dans une lettre ouverte publiée dans un journal populiste à très fort tirage, la Kronen Zeitung, ils annonçaient, fin juin, leur intention de procéder désormais à un référendum sur les questions relatives au traité constitutionnel européen, semblant découvrir que c'était aux électeurs de décider. Mais le SPÖ se gardait bien de proposer de soumettre à référendum les mesures antiouvrières, les attaques contre les étudiants, les achats ruineux et inutiles d'avions de chasse.

Sur ces entrefaites, la droite rompit le pacte gouvernemental et provoqua des élections anticipées. Au cours de la campagne électorale, les sociaux-démocrates du SPÖ mirent en avant un « pacte contre la vie chère » en cinq points, incluant notamment la division par deux de la TVA sur les produits alimentaires ou la suppression des frais d'inscription à l'université (excepté pour les non-Européens, autre clin d'oeil à l'extrême droite). Mais pourquoi le SPÖ a-t-il fait exactement le contraire lors de la législature qui venait de s'achever ? Dans ces conditions, les hésitations des électeurs sociaux-démocrates furent nombreuses, et il n'y a rien d'étonnant à ce qu'une partie d'entre eux se soient abstenus.

Aujourd'hui, quelle que soit la configuration du prochain gouvernement qui sortira des tractations, il est certain que les travailleurs n'y auront aucun allié. Il est donc à souhaiter que la classe ouvrière autrichienne sache renouer avec ses lointaines traditions de lutte, seule garantie qu'elle puisse avoir contre les mauvais coups qu'immanquablement tous ces politiciens voudront lui faire subir.

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