1948-1949 : Le blocus de Berlin, épreuve de force entre l'impérialisme et l'Union soviétique.02/07/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/07/une2083.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

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1948-1949 : Le blocus de Berlin, épreuve de force entre l'impérialisme et l'Union soviétique.

Le 24 juin 1948 débutait le " blocus de Berlin ", qui allait être le premier affrontement de la Guerre froide entre les ex-alliés de la guerre et de l'après-guerre, les puissances occidentales rangées derrière les États-Unis d'une part, l'URSS et ses alliés d'autre part. Ce blocus devait durer jusqu'au 12 mai 1949, où l'URSS céda en rouvrant les voies de circulation menant à Berlin.

Depuis 1945, l'Allemagne vaincue n'existait plus en tant qu'État indépendant. Elle était découpée en quatre zones d'occupation, russe à l'est, américaine, anglaise et française à l'ouest, chacune sous commandement militaire. L'ancienne capitale, Berlin, enclavée dans la zone soviétique, était elle-même divisée en quatre zones d'occupation. Ce partage s'inscrivait dans la lignée des accords conclus entre les trois pays alliés contre l'Allemagne : les États-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union soviétique (la France n'ayant été admise au rang de puissance occupante que plus tardivement).

Une alliance contre les peuples.

L'alliance entre les États-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union soviétique se constitua pendant la guerre, quand l'Allemagne attaqua l'Union soviétique en 1941. Cette alliance s'avéra indispensable aux pays impérialistes, qui avaient besoin de la force militaire russe, avec ses millions d'hommes, pour vaincre l'Allemagne. À la fin de la guerre, cette alliance allait également leur être utile pour empêcher tout soulèvement révolutionnaire.

Les dirigeants impérialistes avaient en mémoire la période révolutionnaire de 1917-1919, à la fin de la Première Guerre mondiale qui avait instauré un État ouvrier en Russie et menacé le système capitaliste en Europe, notamment en Allemagne. Leur crainte de voir une révolution éclater était d'autant forte que toute l'Europe avait été ravagée par cinq années de guerre et que la majorité des pays occupés militairement avaient subi le régime de la terreur nazie. Le reflux des armées allemandes risquait de laisser un vide étatique dangereux pour l'ordre capitaliste. Ils avaient besoin de la force militaire de l'URSS pour maintenir l'ordre dans sa zone en attendant que des appareils d'État se mettent en place. Mais, d'autre part, ils avaient aussi besoin du poids que le régime stalinien possédait dans la classe ouvrière, au travers des Partis Communistes, pour s'opposer à toute velléité révolutionnaire et faire accepter à la population des sacrifices pour reconstruire l'économie capitaliste.

Cette alliance fut symbolisée par les accords des conférences de Téhéran, en décembre 1943, et Yalta en février 1945, qui allait devenir le symbole du " partage du monde " en zones d'influence, et ceux de Postdam, en juillet 1945.

Pour l'Allemagne, les accords de Postdam prévoyaient " une éventuelle reconstruction de la vie politique sur des bases démocratiques " - ce qui dans le contexte signifiait l'ordre capitaliste.

Dans la zone qu'elle occupait, l'administration militaire soviétique put s'appuyer, pour reconstituer un appareil d'État, sur les anciens dirigeants du Parti Communiste qui s'étaient réfugiés en URSS et qui avaient survécu aux purges des années 1936-1938. Mais, tout comme les dirigeants des pays impérialistes qui de leur côté trouvèrent peu de personnel politique pas trop compromis avec le régime hitlérien, ils firent appel à des gens qui avaient été de loyaux serviteurs du nazisme.

Il fallait aussi reconstruire l'économie du pays. L'URSS le fit en nationalisant les grandes entreprises ainsi que les vastes domaines agricoles - après s'être payée au titre de réparations en démontant des usines et en prenant des marchandises, comme le fit par ailleurs la France. Les Occidentaux, qui ne voulaient pas au centre de l'Europe d'un État exsangue incapable de contenir une éventuelle expansion de l'URSS, favorisèrent la remise en route de l'économie à coups de milliards de dollars fournis par les États-Unis, les seuls à pouvoir en payer le prix.

Les débuts de la guerre froide.

Plus le danger d'une révolution s'éloignait en Europe, et plus les rapports se tendirent entre l'URSS et les États impérialistes. Déjà en 1946, parlant du glacis que l'Union soviétique avait instauré autour d'elle en Europe de l'Est, le Premier ministre britannique Churchill parlait du " rideau de fer " qui s'était " abattu sur l'Europe ". L'année suivante, le 12 mars 1947, le président américain Truman exposait sa doctrine du " containment ", disant qu'il fallait " contenir le communisme en accordant une aide économique et financière, mais aussi militaire, aux pays considérés comme menacés par celui-ci ". Le plan Marshall, formellement un plan d'aide économique à l'Europe pour l'aider à se reconstruire, avait pour objectif politique d'attirer dans la sphère occidentale les États d'Europe centrale qui appartenaient à la zone soviétique. L'année 1947 marquait ainsi la fin de l'alliance entre la bureaucratie soviétique et l'impérialisme issue de la Seconde Guerre mondiale.

La Guerre froide qui débutait accéléra la création de deux États allemands. La division du territoire correspondait en gros à la position des armées à la fin de la guerre. Mais dès décembre 1946, déjà, les Britanniques et les Américains avaient fusionné leurs zones respectives. Le 3 avril 1948, la zone occidentale bénéficia de la " loi d'aide économique à l'Europe " (c'est-à-dire le plan Marshall) et reçut 1,4 milliard de dollars, qui s'ajoutaient aux 2 milliards déjà versés. En juin fut créée une monnaie unique pour la zone occidentale, le Deutsche Mark, isolant encore plus la partie de l'Allemagne occupée par l'Union soviétique. Cette dernière riposta en organisant le blocus de Berlin.

Le blocus de berlin.

Berlin, de par sa position, cristallisa la crise, puisque les Occidentaux avaient besoin de traverser la zone sous contrôle soviétique pour ravitailler la ville. En réponse à la création de cette monnaie unique, le gouvernement militaire soviétique suspendit le 23 juin la fourniture de courant et de charbon dans la partie ouest de la ville et, le lendemain, interdit aux Occidentaux d'emprunter les routes, canaux et voies ferrées qui reliaient la zone occidentale à Berlin.

Cependant Staline n'osa pas s'opposer aux communications par voie aérienne. Abattre pour cela des avions américains, cela aurait été prendre le risque d'un conflit ouvert avec les USA.

Les dirigeants américains mirent alors en place un gigantesque pont aérien pour ravitailler la ville, et ils assurèrent l'essentiel des transports, faisant en même temps la démonstration de leur puissance. Trois couloirs aériens reliaient Berlin à l'Ouest, et ils permirent qu'un avion atterrisse toutes les trois minutes. Chaque jour furent livrées quelque 8 000 tonnes de marchandises : charbon, essence, matières premières, vivres, etc. En tout, pendant les dix mois que dura le blocus, plus de 278 000 vols allaient être assurés, dont près de 190 000 par les États-Unis.

La bureaucratie stalinienne finit par reculer devant cette démonstration de force et le blocus fut levé le 12 mai 1949. Les voies terrestres furent rouvertes, mais le pont aérien fut maintenu jusqu'à la fin septembre.

Le blocus accéléra la séparation de l'Allemagne en deux États. Le 23 mai 1949 fut créée à l'ouest la République fédérale allemande (RFA), tandis qu'à l'est la République démocratique allemande (RDA) naissait officiellement en octobre 1949.

L'impérialisme américain sortit finalement avec succès de cette partie de poker menteur que fut le premier affrontement de la Guerre froide.

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