Les deux hommes qui s'affrontent aujourd'hui, le président Mwai Kibaki, comme son rival Raila Odinga, sont de vieux chevaux de retour. Tous deux ont fait leurs classes sous la dictature d'Arap Moi, qui régna sur le Kenya de 1978 à 2002.

Mwai Kibaki fut vice-président du régime Moi, de 1978 à 1988, avant de passer à l'opposition dans les années 1990. Raila Odinga, pour sa part, fils du premier vice-président du Kenya, oscilla entra les postes ministériels dans le régime de Moi et les cachots de ses prisons.

En 2002, la Constitution força Moi à la retraite. Mwai Kibaki lui succéda en battant le candidat de l'ancien parti unique, lors d'une élection tenue la même année. À l'époque Kibaki se présentait comme l'homme du changement, déterminé à éradiquer la corruption. Mais les illusions furent de courte durée. Dès 2005, celui que Kibaki avait chargé de la lutte contre la corruption dans son gouvernement se réfugiait à Londres, craignant pour sa vie, tandis qu'éclataient une série de scandales financiers portant sur des centaines de millions de dollars.

Après l'élection de 2002, Odinga, auparavant opposé au parti de Kibaki, se rabibocha avec lui et rejoignit son gouvernement. L'alliance ne dura guère puisqu'en 2005, Odinga se retrouva leader de l'opposition, à la tête d'une coalition de circonstance, le Mouvement Démocratique Orange (Orange Democratic Movement, ODM, en anglais), inspiré de la " révolution orange " en Ukraine.

Les deux hommes qui s'affrontent aujourd'hui pour le pouvoir ont donc l'un et l'autre une lourde part de responsabilité dans la décomposition de l'État et la pauvreté extrême subie par la majorité de la population.

Bien que sa réélection ait été contestée, Kibaki s'accroche au pouvoir. Cependant, demain, il n'est pas impossible qu'Odinga s'entende avec lui, en échange d'une place à la hauteur de ses ambitions personnelles car, sur le plan politique, rien n'oppose les deux rivaux.