Italie : Deux ouvriers asphyxiés à fond de cale23/01/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/01/une2060.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : Deux ouvriers asphyxiés à fond de cale

Les travailleurs des ports italiens ont arrêté le travail, entre le 19 et le 21 janvier, à la suite de la mort de deux de leurs camarades, asphyxiés dans la cale d'un navire dans la nuit du 17 au 18 janvier.

Le danger est pourtant connu, et les mesures de sécurité existent. Un navire sous pavillon panaméen, le World Trader, arrivé peu auparavant à Porto Marghera, le port industriel proche de Venise, devait être vidé de son chargement de soja. Or un tel chargement dégage par fermentation une grande quantité de gaz carbonique et de monoxyde de carbone, et la cale du navire doit être aérée pendant plusieurs heures avant toute intervention humaine. De plus, le taux d'oxygène présent dans l'atmosphère de la cale doit être mesuré, et ne doit pas être inférieur à 17 %. C'était loin d'être le cas.

D'après les mesures faites par les pompiers après l'accident, le taux d'oxygène dans la cale n'excédait pas 5 % et la concentration de monoxyde était forte. Le premier ouvrier descendu à fond de cale s'est évanoui immédiatement. Son camarade, qui s'en est aperçu et a voulu lui porter secours, a également perdu connaissance. Un troisième, un marin roumain de l'équipage, a donné l'alarme. Muni d'un appareil de respiration, il a réussi à ramener l'un des deux accidentés à la surface et tenté de le ranimer à l'aide d'une bombonne d'oxygène... mais celle-ci s'est révélée vide.

Il s'avère maintenant que le commandement du navire a fait commencer le déchargement peu après son arrivée à Porto Marghera. Les deux ouvriers du port étaient l'un intérimaire, l'autre employé par une société de sous-traitance, et n'avaient sans doute guère le choix que d'accepter les conditions imposées, en espérant que le nécessaire ait été fait. Or, de toute évidence, les mesures de sécurité élémentaires n'avaient pas été prises.

C'est sans doute très souvent le cas, même si ce n'est pas à chaque fois mortel. Sur les ports italiens, comme dans le reste de l'industrie, les emplois précaires en intérim ou en sous-traitance se sont multipliés, de même que le transport sur des navires à pavillon de complaisance avec des équipages peu formés et sous-payés, des matériels de sécurité hors d'usage et l'impératif de faire le plus vite possible.

Ces deux morts viennent donc s'ajouter à la triste série des " morts blanches ", ainsi qu'on nomme en Italie les morts par accident du travail, particulièrement nombreuses. Début décembre, ce sont six ouvriers de l'usine Thyssen-Krupp de Turin qui sont morts brûlés dans un incendie survenu au laminoir, là aussi en l'absence de la sécurité la plus élémentaire. Mais c'est chaque jour que des travailleurs meurent dans des usines, des chantiers, des entrepôts.

Début décembre, les travailleurs turinois ont manifesté contre cette insécurité ; c'est maintenant le tour des travailleurs des ports. Mais pour tous, mettre un terme à l'arrogance et au mépris de la vie d'un patronat prêt à exploiter les travailleurs dans n'importe quelles conditions devient une question de vie ou de mort.

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