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Allemagne : Salaire minimum et salaires de misère
Après des mois de débat au sein de la " grande coalition " gouvernementale allemande (qui réunit la droite et le Parti Social-Démocrate), la majorité des députés au Bundestag a voté, le 14 décembre, l'introduction, à partir du 1er janvier 2008, d'un salaire minimal dans la distribution postale, qui s'élève à 9,8 euros dans l'Ouest de l'Allemagne... mais à seulement 8 euros à l'Est (dix-huit ans après la réunification du pays !).
Pour les 220 000 employés de la Poste, dont les salaires sont plus élevés que ce minimum, cela ne devrait pas changer grand-chose. Sauf si, au cours de la renégociation de la convention salariale qui doit avoir lieu au printemps prochain, l'entreprise proposait d'abaisser son salaire d'embauche au niveau du nouveau salaire minimum. Dans un contexte où, comme en France, le problème des salaires trop bas est une des principales préoccupations des milieux populaires, le gouvernement peut ainsi faire semblant de se préoccuper du pouvoir d'achat... dans un secteur bien limité.
Mais les concurrents privés de la Poste, qui ont accumulé des profits sur le dos de travailleurs sous-payés (nombre de leurs salariés touchent moins de 1 000 euros net par mois), ne l'entendent pas de cette oreille. Ainsi l'entreprise TNT, qui appartient à la Poste néerlandaise - elle-même privatisée depuis 1989 - a tout simplement déclaré qu'elle ignorerait la loi. Quant à Pin AG, filiale du groupe de médias Springer, elle a menacé de licencier des milliers de salariés car l'activité ne serait plus rentable !
Autre manoeuvre : le syndicat patronal Nouvelles Activités de Distribution Postale, qui regroupe 35 entreprises privées du secteur et a été créé opportunément il y a seulement quelques mois, veut définir une nouvelle branche d'activité... en jouant par exemple sur le fait que le salaire minimum ne doit s'appliquer que dans les entreprises dont l'activité principale est la distribution de courrier. Il entend négocier des salaires minimaux bien plus bas (6,50 euros à l'Est et 7,50 euros à l'Ouest) !
Au-delà, cette affaire met une nouvelle fois en lumière les salaires de misère existant dans bien des secteurs d'activité. Il n'y a pas de salaire minimum en Allemagne, hormis dans quelques secteurs bien précis, comme depuis 1996 dans le bâtiment, ou encore, depuis quelques mois, dans le nettoyage. Mais une enquête du syndicat IG Bau a fait ressortir que 20 % des entreprises de nettoyage ne respectaient pas ce minimum ! Ailleurs, il n'est pas rare, surtout dans l'ex-RDA, de trouver du personnel payé 4 ou 5 euros de l'heure, en particulier dans des services comme la restauration.
Quant à l'Agence fédérale pour le travail, elle vient de rendre publique une enquête selon laquelle 2,1 millions de personnes ont un deuxième travail à côté de leur emploi principal. Ce nombre est en augmentation de 750 000 depuis l'enquête précédente réalisée il y a quatre ans et il en dit long sur l'augmentation de la pauvreté dans les classes populaires.