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Moyen-Orient : De la conférence d'Annapolis à un " processus de paix "... de plus
La conférence internationale convoquée mardi 27 novembre à Annapolis (Maryland) par George Bush est censée relancer le processus de paix entre Israël et l'Autorité palestinienne. Un calendrier de négociations a été fixé avec la promesse qu'une solution du problème palestinien serait trouvée avant la fin de 2008. Mais Bush n'est pas le premier président américain à faire ce genre de geste en fin de mandat, sans que cela ait désamorcé jusqu'à présent un conflit qui dure depuis des décennies.
Depuis son arrivée en 2000, l'administration Bush ne faisait même pas semblant de chercher une solution au conflit, laissant son protégé israélien agir à sa guise. Et comme si ce foyer de tension ne suffisait pas au Moyen-Orient, elle y a ajouté ses interventions militaires en Afghanistan, puis en Irak, soumis désormais à une occupation américaine et occidentale, dont le fiasco est évident.
Mais il fallait tout de même donner une chance à Bush de sortir de la Maison-Blanche sur une apparence de succès en politique extérieure. Condoleezza Rice a multiplié les déplacements pour préparer cette réunion à grand spectacle avec les représentants des grandes puissances et de l'ensemble des pays arabes, et surtout le Premier ministre israélien Ehud Olmert et le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. Le vice-ministre syrien des Affaires étrangères a même été convaincu au dernier moment de participer, grâce à la promesse que l'on parlerait du Golan syrien occupé par Israël.
La conférence a annoncé un calendrier qui devrait aboutir à la solution du conflit israélo-arabe, avec en particulier la création d'un État palestinien indépendant. Mais ce n'est pas la première fois qu'un plan de négociations est proposé... sans jamais aboutir. La principale raison est que les dirigeants israéliens ne tiennent nullement à faire les concessions qui seraient indispensables pour mettre fin au conflit, mais qui les obligeraient à s'affronter aux colons de Cisjordanie et à tous les partisans du jusqu'auboutisme contre les Arabes. Quant aux États-Unis, ils n'ont jamais voulu faire pression sur les dirigeants israéliens pour les obliger à ces concessions car, au fond, la persistance du conflit israélo-arabe leur rend service.
Alors on se demande pourquoi la conférence d'Annapolis pourrait ouvrir la voie d'une solution, si les attitudes israélienne et américaine ne changent pas. Dans l'immédiat elle répond surtout à un besoin : il faut de nouveau donner au moins l'illusion qu'un " processus de paix " existe. Le fait qu'il y ait des négociations, des échéances, des calendriers, permet au moins à des dirigeants comme le Palestinien Mahmoud Abbas de contrer la surenchère du Hamas ou d'autres partis islamistes, et de prétendre que sa politique de dialogue, voire de collaboration avec les autorités israéliennes, peut un jour conduire à la paix et à la fin de la situation insupportable qui est aujourd'hui celle des Palestiniens.
Au-delà même, cette restauration d'un " processus de paix " est nécessaire à l'ensemble des dirigeants des pays arabes pour justifier leur politique face à leur propre opinion publique, et pour contrer les opposants, en général des islamistes intégristes qui, souvent avec l'appui de l'Iran, leur reprochent leurs compromissions.
Après Annapolis, il y aura donc peut-être de nouveau un " processus de paix " car après sept ans à la présidence, Bush a compris que cela pouvait avoir quelque utilité pour restaurer la crédibilité des États-Unis dans la région moyen-orientale. Reste à savoir si, en l'absence des choix nécessaires que chacun connaît, et qui pourraient mettre fin au conflit, ce " processus " pourra faire illusion, et pour combien de temps.