Italie : Mortalité au travail rime avec bas salaires et précarité02/05/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/05/une2022.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : Mortalité au travail rime avec bas salaires et précarité

Ces derniers jours, une série d'accidents mortels du travail ont attiré de nouveau l'attention sur le nombre énorme de morts et blessés que l'on enregistre chaque année en Italie dans ce domaine. Selon les données officielles, le nombre des morts par accident du travail a été de 1 280 en 2006, un peu plus que les 1 265 de l'année précédente.

Tant le gouvernement que le président de la République lui-même, s'affirmant " indignés ", ont déclaré que ce record de mortalité que détiennent les chantiers, les usines et les autres lieux de travail italiens, comparés au reste de l'Europe, était " honteux ". Mais, le jour même où le Conseil des ministres approuvait un nouveau projet de loi sur la santé et la sécurité sur les lieux de travail, un docker mourait à Gênes, deux travailleurs du bâtiment décédaient à Monza et à Latina, alors qu'à Brescia une explosion tuait un travailleur immigré d'origine marocaine qui effectuait une soudure.

Alors, ce massacre d'ouvriers auquel on assiste chaque année est-il vraiment dû à l'absence de lois adéquates ?

Toutes les lois peuvent sans doute être améliorées, mais les lois actuellement en vigueur ne sont pas pires que celles de l'Angleterre où la mortalité au travail est six fois moindre, ou que celles de l'Allemagne où le nombre d'accidents mortels est la moitié de ce qu'il est en Italie.

Les risques encourus au travail dépendent directement du rapport de forces avec le patronat et de la détérioration des conditions d'existence des travailleurs.

Prodi, le chef du gouvernement, cherche à nous émouvoir en définissant les morts au travail comme " des martyrs qui se sacrifient pour nous tous ". Mais lui-même sait parfaitement quelles sont les conditions de travail dans les usines, dans les ports et dans les chantiers en Italie. Il sait très bien comment, spéculant sur le besoin de chacun de travailler, accentué par la crainte du chômage, les ouvriers s'adaptent bon gré mal gré au fait de travailler sans respecter ces normes de sécurité qui, pour les dirigeants d'entreprises, sont autant de frais inutiles et de contraintes intolérables qui ralentissent la production. Lui et les autres dirigeants politiques qui " s'indignent " savent parfaitement qu'étant donné les salaires de misère perçus dans les secteurs du bâtiment ou de la métallurgie, les travailleurs cherchent souvent dans les heures supplémentaires le moyen de finir le mois. On travaille une ou deux heures, voire plus, que la normale, dans des conditions souvent difficiles et on s'expose inéluctablement aux risques dus à la fatigue.

Les larmes de crocodile des hommes du gouvernement ou de l'opposition, sans parler des représentants patronaux, ne nous font pas oublier leurs incitations continuelles à augmenter les horaires de travail ou à réduire le nombre de travailleurs sans réduire la production, ou à réduire les coûts en recourant à la sous-traitance en cascade.

Il y a quelques jours à peine, rappelons-le, le ministre des Finances, Padoa-Schioppa, a déclaré qu'il ne voit pas pourquoi en Italie il devrait encore y avoir deux agents de conduite par train, au lieu d'un seul comme dans d'autres pays européens. Comme s'il n'y avait aucun rapport entre la sécurité du trafic ferroviaire et le nombre de cheminots présents sur les trains !

Les dockers de Gênes ont répondu par la grève à la mort de leur camarade. C'est la réponse qu'il faudrait toujours donner dans des cas comme celui-là.

Mais les conditions d'une véritable diminution des risques d'accident du travail seraient d'abord une augmentation généralisée des salaires, et des emplois dont la stabilité soit garantie. Sans la menace de la misère, sans la peur de ne pas voir prolongé un contrat à durée déterminée ou en intérim, les travailleurs respecteront bien plus facilement les normes qui protègent leur santé et leur vie, et surtout ils contraindront les patrons à en faire autant.

Article extrait du journal de nos camarades italiens L'Internazionale n° 69 mai 2007

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