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Tribune de la minorité
Le massacre continue, avec la bénédiction des «grands»
Cela fait bientôt deux semaines que l'aviation israélienne pilonne les villages du sud Liban. Certains quartiers de Beyrouth, la capitale, ont été dévastés. Plus de 350 Libanais ont été tués, dont 310 civils, sans compter des milliers de blessés, de mutilés. Des familles entières ont été ensevelies sous les décombres de leur maison. Les moyens de se soigner, de se ravitailler, sont anéantis dans toute une partie du pays. L'état-major israélien largue parfois des tracts invitant les populations à quitter les zones qu'il s'apprête à bombarder, mais comment fuir quand les routes et les ponts ont été détruits par les attaques précédentes, et que les véhicules civils eux-mêmes sont visés?
C'est l'enlèvement de deux soldats israéliens par le groupe islamiste Hezbollah qui a fourni le premier prétexte à l'agression israélienne. Le Hezbollah a riposté en lançant des roquettes sur les villes à sa portée, au nord d'Israël, faisant une trentaine de morts, dont la moitié de civils. Une «réplique» qui a fait l'affaire des va-t-en guerres israéliens, puisqu'ils peuvent maintenant aussi prétexter la sécurité des populations israéliennes pour bombarder les populations libanaises... Avant de préparer, peut-être, une nouvelle escalade, les chars israéliens ayant déjà pénétré le sud Liban.
Le Hezbollah libanais n'hésite pas non plus de son côté à tirer sur des populations civiles. Pour ce parti islamiste, la vie d'Israéliens innocents n'a aucune valeur. Pas plus d'ailleurs que celle des civils libanais, dont il se sert comme boucliers humains. Le Hezbollah fait finalement preuve du même mépris des populations que ses inspirateurs, les chefs de la dictature iranienne.
Mais il y a un cynisme écoeurant, de la part des dirigeants israéliens, à présenter leur agression comme de la légitime défense. Car la guerre actuelle n'est qu'une nouvelle manifestation de l'oppression coloniale que l'État israélien impose dans la région, en premier lieu contre la population palestinienne. Et la puissance de feu de l'armée israélienne, massivement équipée par les États-Unis, est sans commune mesure avec les moyens de guerre artisanaux du Hezbollah. Le rapport de 1 à 10 entre le nombre de victimes israéliennes et libanaises est à l'image de cette disproportion. Cette guerre est bien une guerre de pays riche contre des populations pauvres.
C'est donc tout logiquement que les pays riches ont choisi leur camp, celui qui défend leur ordre au Moyen Orient, malgré les phrases diplomatiques appelant bien sûr à l'arrêt des violences. Les États-Unis, qui disposent de moyens de pression décisifs, laissent pour le moment la bride sur le cou aux généraux israéliens. Le Pentagone a même accéléré la livraison à Israël de bombes guidées par laser! Empêtré dans ses difficultés en Irak, Bush a trop besoin de son pion israélien pour marchander son soutien.
La France de Chirac, comme les autres pays impérialistes, suit la ligne. Il y a bien quelques nuances de phrases et de poses, les intérêts de la bourgeoisie française sont peut-être un peu différents de ceux des classes dirigeantes des USA, ses acheteurs d'armes plus arabes qu'israéliens, mais ça ne change rien à la solidarité fondamentale que manifestent les grandes puissances à l'égard de leur gendarme favori au Proche-Orient.
S'il y a des voix discordantes, il faut les chercher ailleurs. À Tel-Aviv, samedi, un millier d'Israéliens manifestaient pour protester contre la guerre de leur propre gouvernement et réclamer la libération des milliers de prisonniers palestiniens et libanais. Aussi faible soit-elle pour le moment, c'est ce type de pression qui pourrait finir par changer les choses, si elle réussissait à rencontrer la révolte des populations arabes. Car cela fait des décennies que l'État israélien fait régner, par la terreur militaire, son ordre colonial. Et il n'y a aucune chance que cela change tant que seront foulés aux pieds les droits élémentaires des peuples, à commencer par le droit des Palestiniens à avoir leur État et les moyens d'une vie humaine.
Quant à nous travailleurs d'ici, nous avons le devoir d'empêcher notre propre gouvernement d'apporter son aide au premier responsable des massacres actuels, l'État d'Israël.
Editorial des bulletins d'entreprises l'Etincelle publiés par la Fraction du 24 juillet 2006