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Leur société
Parti Socialiste : Petite guerre pour une même politique
«Impossible de construire quelque chose avec Hollande, (qui) nous a conduits à deux désastres, en 2002 et en 2005». C'est ce qu'a déclaré, lors de la Fête de la rose à Frangy, en Saône-et-Loire, Arnaud Montebourg, cofondateur avec Vincent Peillon du courant Nouveau Parti Socialiste, la tendance qui monte... ou du moins qui essaye et cherche à créer, avec Fabius et Emmanuelli, une majorité alternative à celle de Hollande.
Depuis quelque temps, les chefs du Parti Socialiste s'envoient à la figure des gentillesses qui font les délices des médias. Daniel Vaillant, proche de François Hollande, traite Bartolone, le second de Fabius, de «porte-flingue». Michel Rocard déclare: «Nous devenons de jour en jour insupportables les uns aux autres. Nous nous paralysons mutuellement», et évoque, en cas de victoire de Fabius au prochain congrès du PS, la création éventuelle d'un nouveau parti. D'autres prennent la pose au-dessus de la mêlée, comme Jack Lang.
Celui-ci stigmatise cette bataille de «chiffonniers» et proclame que la très prochaine université d'été du PS «ne doit pas devenir un concours d'écuries présidentielles, une compétition de divas». Il sait sûrement de quoi il parle, lui qui s'est déjà déclaré candidat à la candidature présidentielle. Mais tous, de Lang à Strauss-Kahn en passant par Peillon et Montebourg, déclarent, évidemment, qu'il ne faut pas en rester à un combat de personnes, mais bien mener un vrai débat «pour les idées, pour un programme de société».
Parlons-en, de ce programme. Les plus traditionnels, comme Strauss-Kahn, s'affirment partisans d'un «réformisme de gauche (...) pas très éloigné de ce que le gouvernement Jospin a fait de 1997 à 2000». Julien Dray vient à sa rescousse en affirmant que «la preuve que la social-démocratie a un bel avenir est donnée par nos amis scandinaves.» Mais Montebourg, qui se veut novateur, déclare fermement qu'il refuse cette «sorte de gauche minimale qui théorise la victoire absolue du capitalisme qu'il faudrait se contenter d'aménager».
Pour Montebourg, «la majorité de Hollande et de Strauss-Kahn nie les dégâts de la mondialisation et (...) refuse finalement de s'y attaquer». Il se voit donc comme représentant «la gauche volontaire, qui accepte l'idée qu'on puisse se confronter avec l'ordre économique actuel». Voilà de fortes paroles, trempées dans un vocabulaire radical qui redevient à la mode. Mais, à bien y regarder, Montebourg ne s'emballe tout de même pas. Il ne parle que de «se confronter»! Et quand il cherche un modèle, Montebourg le trouve... chez François Mitterrand «qui a su réformer la SFIO en 1972 pour arriver au 10 mai 1981».
Le modèle est en effet édifiant. Mitterrand, lui aussi, tint de fortes paroles quand il reprit en main le vieux parti socialiste: «La révolution, c'est d'abord une rupture», proclamait-il en 1971, au congrès d'Épinay, ajoutant que «celui qui ne consent pas à la rupture avec l'ordre établi... ne peut être adhérent au PS». On connaît la suite. La gauche au pouvoir en 1981 fit quelques gestes sans lendemain envers les travailleurs, et d'autres beaucoup plus importants envers les patrons, tels que des subventions et une généreuse indemnisation des nationalisations, ce qui fut le début «de la réconciliation du socialisme avec la Bourse», selon les termes du Premier ministre socialiste Bérégovoy. Sans parler du blocage des salaires, des licenciements et de la montée du chômage, bref, de la politique de droite qu'ont menée tous les gouvernements de gauche depuis lors et qu'ils continueront à mener, quel que soit le futur dirigeant du Parti Socialiste.
Au fond, ce qu'un Montebourg ou ses semblables reprochent à Hollande et à ses proches, c'est de ne même pas faire l'effort de tromper son monde, comme Mitterrand le fit à son époque, avant d'être élu. Et de se proposer pour aider un Fabius, par exemple, à faire un peu illusion. Sacré «débat d'idées»!