Messier traduit en justice : Ces escrocs qui nous dirigent25/06/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/06/une1873.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Messier traduit en justice : Ces escrocs qui nous dirigent

Jean-Marie Messier, l'ex-PDG de Vivendi Universal, a passé une nuit en garde à vue dans les locaux de la brigade financière, lundi 21 juin, et vient d'être mis en examen pour "manipulation de cours boursiers, diffusion de fausses informations, délit d'initié et abus de bien sociaux".

Alors que les cours des actions Vivendi étaient au plus bas, en septembre 2001, il aurait fait procéder en secret à des achats massifs de celles-ci, afin de faire monter leur prix juste avant la publication des résultats du groupe; il lui est aussi reproché d'avoir caché l'ampleur des dettes et de s'être séparé de ses stocks-options juste avant la chute des cours, en décembre 2001, empochant ainsi un confortable pactole.

Messier aurait donc commis pas moins de quatre infractions aux règles de fonctionnement que les milieux financiers se fixent entre eux afin, disent-ils, d'assurer la transparence des comptes et d'empêcher les opérations douteuses ou les détournements -manière élégante de dire qu'ils veulent éviter que certains requins ne s'approprient trop de parts du gâteau au détriment des autres. D'ailleurs, si Messier est aujourd'hui inquiété, c'est suite à la plainte déposée par une association de petits actionnaires, qui estime qu'il a fait perdre cinquante milliards d'euros à un million de petits porteurs, pendant que lui-même s'enrichissait.

Ces règlements de comptes au grand jour révèlent donc les pratiques douteuses (même selon leurs propres critères) qui existent dans les milieux financiers et industriels, où des dirigeants d'entreprises se servent de leur pouvoir pour s'en mettre plein les poches, au lieu de défendre les intérêts de tous les actionnaires qu'ils sont censés enrichir. Parfois, certains, comme Messier, Pinault ou Le Floch-Prigent, se font épingler et ont affaire à la justice; ils peuvent même être condamnés à de la prison. On nous les présente alors comme les brebis galeuses d'un système qui, par ailleurs, fonctionnerait bien, avec ses codes et ses lois.

Mais en fait, c'est tout le système qui permet ce genre d'escroquerie, à commencer par la première qui réside en ce qu'une infime minorité de possédants s'approprie la majeure partie des richesses créées par les travailleurs. Ainsi, il n'est pas reproché à Messier d'avoir spéculé, ce qui est la façon "normale" pour les détenteurs de capitaux de s'enrichir au jeu de la Bourse, mais de l'avoir fait hors délais!

Ce sont ces affairistes, dont certains contreviennent même à leurs propres lois, que l'on nous présente comme étant des "décideurs" indispensables à l'économie capitaliste. Ils décident, en effet, mais uniquement en fonction de leur intérêt personnel. Et si cet intérêt leur dicte de licencier d'un coup des centaines ou des milliers de travailleurs, ils le font sans états d'âme, pourvu que cela leur rapporte encore plus, sans encourir les foudres de la loi... ou de leurs actionnaires qui considèrent au contraire que c'est de la bonne gestion. Et ce sont ces gens-là qui contrôlent la production et la distribution des richesses et qui dirigent, avec les hommes d'État à leur service, toute la société.

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